Pourquoi adorer ?

 

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Parfois la vie des hommes devient un immense émerveillement, et cela malgré les flots de mauvaises nouvelles qui accablent notre monde. Comment cela peut-il se produire? Encore une fois je réponds: grâce à la science moderne et à ses découvertes. La physique des particules associée à l'astronomie peut déjà être à l'origine d'une grande source de surprises étonnantes, mais aussi d'effroi. En effet, l'infiniment grand, que l'on peut imaginer car on découvre chaque jour un peu plus du cosmos, est cependant assez déstabilisant compte tenu de notre petitesse. Heureusement, plonger dans l'infiniment petit et découvrir que par rapport à lui nous sommes infiniment grands, donc que nous sommes au centre de la création est assez rassurant. Cependant si notre équilibre intellectuel est rétabli, notre équilibre spirituel reste encore à trouver. Décidément, même si la création est une merveille incommensurable, justement parce qu'elle est incommensurable, elle est parfois bien déstabilisante. Oui, Dieu est vraiment trop grand pour les petites créatures que nous sommes! 

Pourtant d'autres découvertes scientifiques, notamment sur la fonction des organes des animaux vivants, nous transportent dans une admiration sans borne. Quant aux découvertes médicales, en particulier celles qui concernent l'adaptation du cerveau humain aux différentes tâches qu'un homme accomplit, elles nous laissent sans parole. Ainsi, un cerveau humain se modifie pour être le plus capable possible d'effectuer parfaitement et rapidement les travaux professionnels qui lui sont demandés quotidiennement. Si à ces fonctions du cerveau on ajoute les fonctions, certes plus simples, des autres organes vitaux, on demeure subjugué. Que dire? Que faire? Cette perfection étonnante n'a pas pu se fabriquer toute seule. Et peu à peu on aboutit à des pensées plus abstraites, tout aussi déroutantes, sauf si elles conduisent à Dieu. 

Chaque homme peut donc méditer: les fonctions de mes organes, elles se sont développées sans moi… La perfection étonnante de mon cerveau me bouleverse. Et plus je prends conscience de ces merveilles, plus je suis stupéfiée. Comment cela peut-il se faire? Qui fait ces choses? Voilà que j'entre dans le domaine des pensées abstraites, je vais au-delà de ce que je suis, d'où je viens… et je ne sais pas d'où vient la vie qui me fait vivre… je ne comprends plus rien. Voici que je rencontre Dieu. Et j'adore. 

L'adoration, c'est cela: rester muet devant Dieu, devant l'intelligence infinie, l'intelligence qui nous a conçus et adaptés, à l'avance, aux circonstances imprévisibles, imprévisibles pour nous, que nous rencontrerions durant notre vie. Dès l'origine, tout en nous est au service des actions que nous serons destinés à accomplir et aux pensées qui, un jour, surgiront en nous. Et c'est le Créateur qui a tout façonné, tout adapté, tout prévu… Et tout cela dans le cadre d'une liberté réelle, la liberté que Dieu donne à chaque homme, liberté inouïe, pour que chacun puisse L'aimer.  

Décidément, plus nous pensons, plus nous réfléchissons, et moins nous comprenons. Il nous reste tout simplement, à adorer…  en  acceptant notre condition humaine, dans l'adoration. Et voici que notre adoration se concrétise: oui, vraiment, pour retrouver le bonheur, il faut revenir à Dieu et à sa Loi. Oui, nous devons revenir à Dieu; car voici que notre pensée nous redit: pour revenir à Dieu, nous devons revenir à l'adoration. Adorer, ce n'est pas seulement se prosterner devant un Être infiniment puissant, adorer c'est aussi comprendre que nous n'existons que par la Volonté de Dieu. Par nous-mêmes, nous ne sommes rien, nous devons tout à Dieu; et quand nous reconnaissons cette vérité imparable, quand notre esprit comprend que Dieu seul EST et que les hommes ne sont que des créatures entièrement dépendantes de la Volonté et de l'Amour de Dieu, nous sommes soudain dépassés, nous découvrons notre petitesse, notre infinie petitesse et nous perdons pied, et nous avons peur. Alors, nous nous prosternons devant Dieu notre Père, et nous adorons.  

Nous adorons Dieu dans une grande prosternation après avoir reconnu que par nous-mêmes nous ne pouvons rien, que nous ne sommes que par Dieu qui seul Est et qui seul peut ce qu'Il veut; adorer Dieu de cette façon pourrait cependant avoir quelque chose de profondément déstabilisant, surtout pour les nouveaux convertis, pour ceux qui niaient Dieu depuis toujours, si, en même temps, ils ne découvraient que Dieu est aussi l'Amour. L'homme qui découvre Dieu pour la première fois pourrait être totalement écrasé par la Force infinie qui s'impose à Lui s'il ne découvrait en même temps son Amour, cet Amour qui crée et qui désire rendre heureuses toutes ses créatures. Alors, bientôt, l'homme devenu croyant et désirant l'Amour qui le fait vivre, l'homme qui adore véritablement son créateur reste perplexe: comment adorer dans la vérité, dans la paix, dans la joie et dans la confiance? Et comment ne pas retomber dans ses erreurs passées? Car l'amour exigeant la liberté, l'homme livré à lui-même et à ses tendances mauvaises liées à ses péchés, se met à craindre cette liberté qu'il revendiqua pendant si longtemps. Une seule réponse: l'adoration eucharistique. 

Dieu a créé l'homme. Mais tenté par les mensonges de Satan, l'homme a péché, l'homme a refusé Dieu et est tombé dans le malheur. Mais Dieu-Amour est aussi Miséricorde, et la Miséricorde divine "pleure" devant le malheur de ses pauvres créatures bien-aimées. Alors Dieu envoya sa Parole, son Verbe, s'incarner en Jésus-Christ. Et le Verbe de Dieu vécut au milieu des hommes une vie d'homme ordinaire, vie pleine de joies mais aussi de détresses et de tant de souffrances. Dieu-fait-Homme, Jésus-Christ, voulut connaître toutes les douleurs humaines, et ayant découvert toutes nos faiblesses, Il ne voulut pas nous laisser seuls, car Lui, Dieu et Homme, devait mourir comme tous les hommes. Et Il devait mourir dans des conditions de souffrances indescriptibles. Quel Mystère! 

Jésus allait mourir, innocent, sur une croix, entouré de malfaiteurs. Comment pourrait-Il rester avec ses disciples lorsque, Ressuscité, Il devrait retourner vers le Père après son Ascension? Comment pourrait-Il demeurer avec les hommes? Tout simplement en se livrant dans l'Eucharistie, première étape de sa mortelle offrande: "Prenez et mangez, ceci EST mon corps LIVRÉ pour vous… prenez et buvez: ceci Est mon sang VERSÉ pour vous. Faites ceci en mémoire de Moi." Et pour que les hommes, toujours un peu bornés comprennent ce que signifiait cette offrande faite pour le salut de TOUS les hommes, Jésus dit aussi: "Voici que je suis avec vous jusqu'à la fin du monde!" Ainsi dans son Eucharistie, Jésus est toujours présent, toujours au milieu de nous. 

L'Eucharistie, c'est Dieu avec nous, c'est Dieu présent sous une forme visible mais "pratique" et capable d'être partout dans le monde au même instant, et pour tous les hommes, tous, absolument tous. L'Eucharistie, c'est Jésus présent, vivant au milieu de nous, c'est la présence de Dieu pour tous les hommes, c'est le Verbe de Dieu vraiment vivant au milieu des hommes pour le salut et la conversion de tous les hommes, c'est la vie de tous les hommes. Et, de nos jours, la Vie de Dieu au milieu de nous est de plus en plus nécessaire, car trop d'hommes et de femmes, trop de jeunes désespérant de la vie ne veulent plus de cette vie et se suicident. Mais pourquoi refuser la vie, cette volonté de Dieu-Amour, qui, par amour, veut partager son bonheur à des créatures faites par amour? Pourquoi tant d'hommes, aujourd'hui, ne veulent-ils plus vivre? Parce qu'ils ne veulent plus adorer. Ils ne veulent plus, ou, et c'est beaucoup plus grave, ils ne le peuvent plus. 

L'Eucharistie c'est la présence de Dieu parmi nous; c'est la Présence de Jésus vraiment vivant nous donnant sa vie. Je crois en Dieu, en Jésus. Je crois vraiment, mais je me pose de plus en plus souvent la question: pourquoi tant de gens ne veulent-ils plus vivre? Est-ce parce que les catholiques ne savent plus adorer Dieu? Récemment, sur KTO, un prêtre donnait l'exemple de deux musulmans convertis parce qu'ils avaient vu des chrétiens adorer. Oui, l'adoration est une grande puissance. 

Voici quelques réflexions très personnelles à propos de ce que j'ai vécu et que je vis encore souvent. Je pense à plusieurs de mes amis. Ils sont tournés vers eux-mêmes et ne connaissent qu'eux. Ils recherchent des sensations, ils veulent "sentir", mais toujours pour eux-mêmes. Ils oublient la réalité de Dieu présent, et toujours aimant, mais aimant tous les hommes, tous, sans exception. 

Encore une fois je reviens sur la "spiritualité" prêchée par l'Église de France, depuis cinquante ans. On a prêché à temps et à contre temps que "nous n'avions pas besoin de sentir Dieu", que nous n'avions pas besoin de consolations, nous n'avions pas besoin de ce qui est mystique… On a supprimé l'adoration dans nos églises, les saluts du Saint-Sacrements, les processions, etc… Ceux qui désiraient Dieu et sa présence étaient souvent l'objet de dérisions. Comme beaucoup d'autres, j'ai fait ce que l'on nous prêchait et j'ai travaillé, beaucoup. Je me croyais utile dans ma suractivité, qui, aux yeux de Dieu était inutile, voire néfaste, car c'était moi seule qui travaillais, et je n'avais plus de temps pour Dieu, pour Le prier et L'aimer. 

Aujourd'hui, le vide dans notre monde est tel que peu à peu, mais, hélas, avec encore trop de prudence, on revient à l'adoration, car on ne peut pas se passer de Dieu. Prendre du temps pour Dieu, pour Le prier, pour L'adorer, est devenu indispensable. Notre monde est sans Dieu parce que les chrétiens ont oublié Dieu. Il faut revenir à l'adoration de Dieu et du Saint-Sacrement, c'est indispensable si nous voulons convertir les musulmans et les adeptes d'autres religions à la foi chrétienne, car eux, ils savent adorer. 

Je viens d'écrire que des groupes d'adoration se créent de plus en plus dans les paroisses, mais ils sont encore trop peu fréquentés. Nos contemporains habitués à se passer de Dieu et accros de la télévision, ne savent plus prendre un peu de temps pour Dieu. Pourtant, "perdre" du temps pour Dieu c'est gagner du temps. Nos prêtres doivent maintenant oser annoncer les adorations qui se tiennent dans leurs paroisses. Ils doivent aussi remettre en route les saluts au Saint-Sacrement. Peu à peu les paroissiens réapprendront la prière; ils seront d'abord surpris puis ils inviteront aussi leurs jeunes et leurs enfants, et, curieusement, ils s'apercevront qu'ils ont retrouvé le bonheur.

Paulette Leblanc - Février 2014

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