Lorsque, le 21 novembre 1987, l'évêque de Los Teques, Mgr Pio Bello
Ricardo déclara que les apparitions de Betania avaient un caractère
surnaturel authentique, les habitants de Coromoto à vingt kilomètres
de Guanare s'émurent: qu'allait devenir leur sanctuaire vénéré?
Heureusement,
tout se passa bien: en effet, la conférence épiscopale du Venezuela
donnait au sanctuaire de Betania un caractère local et un caractère
national aux apparitions de Coromoto (1652), dont le sanctuaire fut
consacré par Jean Paul II.
Voyons
maintenant ce qui se passa au Venezuela en 1652. Guanare, est une
ville du Venezuela, capitale de l'État de Portuguesa. Elle est
située au centre-ouest du Venezuela, entre les rios Guanare et
Portuguesa, au pied de la montagne, à une altitude de 183 mètres.
L'Évangélisation des Indiens était déjà commencée, mais les Indiens
Kospes, établis à Coromoto résistaient à la présence espagnole et
s'opposaient aux missionnaires. En effet, selon la tradition
nationale, lors de la fondation de la ville de Guanare, le 3
novembre 1591, l’une des tribus autochtones, les Kospes, s’était
enfuie dans la jungle en direction d’El Tocuyo, entre Portuguesa et
Lara. C'est alors que, en 1652 (ou 1651), Notre-Dame intervint.
La
tradition raconte qu'un chef coutumier indien, le cacique,
traversait un ruisseau avec sa femme, quand, tout à coup, tous les
deux virent une dame d’une merveilleuse beauté qui leur dit dans
leur dialecte: "Allez dans la maison des Blancs et demandez-leur
de vous verser de l’eau sur la tête, afin que vous puissiez aller au
ciel." Autrement dit: allez vous faire baptiser. Peu après, le
cacique rencontra Juan Sanchez, un Espagnol s’occupant des terres de
Soropo, au bord du fleuve Guanare, et lui raconta l’apparition. Juan
Sanchez comprit qu'il s'agissait de la Vierge Marie. Il demanda
alors au cacique d’amener sa tribu, huit jours plus tard, afin de
lui donner l’enseignement nécessaire au baptême. Le cacique fut
fidèle au rendez-vous.
La
rencontre eut lieu au confluent des fleuves Guanaguanare et Tucupido
Là, Juan Sanchez répartit les terrains situés autour du lieu de la
rencontre afin que les Indiens de la tribu du cacique les cultivent
et organisent leur campement en ce lieu, tout en faisant leur
catéchuménat en vue du baptême. Tous les indiens suivirent les
enseignements en vue du baptême, sauf le cacique qui regrettait sa
jungle et son indépendance. Là-bas, il commandait; ici, il devait
obéir...
Alors,
toujours selon la tradition, la Vierge lui apparut une seconde fois
dans la nuit du samedi 8 septembre 1652, en présence de son épouse,
de sa belle-sœur Isabel et du fils de celle-ci. Le cacique,
nullement converti, se saisit d’une flèche et visa la Vierge. Mais
Marie, insensible à la menace, s’approchait de lui. Il tira alors
une flèche. Marie disparut, mais lui laissait dans la main un petit
parchemin sur lequel il y avait son image à elle. Le cacique voulait
la brûler, mais un enfant la saisit providentiellement...
Selon
une autre tradition, le cacique Coromoto, rendu aveugle par la
colère, aurait levé le bras pour saisir la Vierge, mais elle avait
disparu. La tradition veut que l'apparition se soit matérialisée
dans une image faite de fibres d'arbre qui se trouve aujourd'hui
dans le sanctuaire national de Notre-Dame de Coromoto. Une image de
27 sur 22 mm représentant la Vierge Marie assise portant l’enfant
Jésus sur les genoux; l’enfant tient le globe terrestre de la main
gauche et bénit de la main droite.
Juan
Sanchez, prévenu se rendit avec deux compagnons sur le lieu de
l’apparition et recueillit la précieuse relique. Puis tous les trois
firent part du "miracle" aux autorités civiles et
ecclésiastiques, mais on ne les crut pas. Pourtant le 1er
février 1654, suite au prodige dont les Indiens fervents rendaient
grâce, il fut décidé de porter l’image à l’église de Guanare, pour y
être vénérée dans un reliquaire en métal précieux. C'est ainsi que
l’apparition de Coromoto, selon le nouveau nom donné au lieu de
l’apparition, réalisa au Venezuela, l’unité culturelle et religieuse
du pays, autour d’un lieu d'apparition puis de culte qui devint le
centre et le symbole religieux de la nation.
Et le
cacique? Que devint-il? Toujours selon la tradition, il retourna
dans la jungle, mais, sur le chemin, il fut mordu par un serpent
venimeux. Il tourna alors son cœur vers Dieu et demanda le baptême.
Quelqu'un qui passait par là versa l’eau sur sa tête: il ne mourut
pas et devint un des apôtres de Notre-Dame. Bientôt un prêtre, le
capucin Fray José de Najera fut envoyé à cette communauté fervente
et le village fut baptisé San-José-de-la-Aparicion. Suite à de
grandes inondations, ce village disparut. Mais le lieu de
l’apparition devint pèlerinage sous le nom de "Notre-Dame de
Coromoto." Il convient de noter que le christianisme des Indiens
doit tout à la Vierge Marie elle-même.
Les
années et les siècles passèrent… Le 1er mars 1942, l’épiscopat
vénézuélien, réuni en session plénière, proclama la Vierge de
Coromoto patronne du Venezuela. Le 7 octobre 1944, le pape Pie XII
ratifiait le décret des évêques; à cette occasion il envoya le
radio-message suivant:
"Acclamez-la, la Vierge, oui, acclamez-la, chers vénézuéliens, elle
est l’aide fondamentale dont la providence s’est servie pour vous
apporter le don inestimable de la foi! Mais vous, qui désormais avez
la foi et êtes les fils d’une nation catholique, venez devant son
trône d’amour et de grâce, en demandant qu’elle vous conserve cette
foi et qu’elle la consolide, libre de toutes les influences
malsaines qui cherchent à la mettre en péril."
En
1950, Notre-Dame de Coromoto fut déclarée officiellement patronne du
Venezuela. Le pape Pie XII couronna la statue et érigea le
sanctuaire de Guanare en basilique. Le 2 février 1975 on décida
d'élever un autre sanctuaire à Notre-Dame, sur le lieu même de
l'apparition, à Coromoto, à 20 kilomètres de Guanare. Le 18 février
1976 fut fondée l'Association Civile Venezuela à la Vierge de
Coromoto, bénie par les évêques le 4 août 1976. Le 10 septembre
1976, la première pierre du sanctuaire national était posée. En
1980, les 252 pilotis destinés à le soutenir étaient installés.
Puis, la petite image de la Vierge, toujours présente, était
incrustée dans le socle d'une statue en bois, statue de Notre-Dame
de Coromoto, que le pape Jean Paul II, invité au Venezuela, couronna
le 27 janvier 1985. Le pape Benoît XVI éleva le sanctuaire national
de Notre-Dame de Coromoto au rang de Basilique mineure.
Actuellement, Coromoto est appelé "Le Lourdes du Venezuela"
parce que les pèlerins y viennent très nombreux, de tout le pays.
Paulette Leblanc |