Nicolas Barré
Prêtre Minime, Fondateur
1621-1686

21

OCTOBRE

 

Nicolas naquit à Amiens, le 21 octobre 1621. Ses parents, commerçants aisés, eurent cinq enfants: un garçon, l'aîné de la famille, et quatre filles. Nicolas fut baptisé le 17 décembre 1621. Si la famille de Nicolas est aisée, il n'en est pas de même dans la société de l'époque: la misère en effet est grande, provoquée par la guerre, la famine et les épidémies. Nicolas a 15 ans lorsque, en août 1636, les espagnols assiègent Corbie, situé à dix-sept kilomètres d'Amiens. En même temps la peste s'abattait sur la région faisant des milliers de victimes. Nicolas voyait toute la misère qui l'entourait, et il en souffrait beaucoup.

Très brillant élève des Jésuites, Nicolas aurait dû poursuivre ses très brillantes études.  Mais, à l'âge de 19 ans, il décida d'entrer dans l'Ordre religieux des Minimes, fondé par St. François de Paule. Les Minimes d'Amiens étaient très proches des gens du peuple, ce que Nicolas désirait. Il prononça ses vœux en 1641 et fut ordonné prêtre en 1645.

De 1645 à 1655, Nicolas assura la charge de professeur de théologie et de bibliothécaire à Paris, au couvent de la place Royale devenue Place des Vosges. À la tâche qui lui avait été confiée, Nicolas joignit, comme tout Minime, la direction spirituelle et la prédication. Mais l'excès de travail et d'austérités, la fatigue, les tensions, les désillusions, l'entrainèrent peu à peu dans la nuit de l'angoisse et du doute. Nicolas écrira: "J’emploie et je pousse tout ce que j'ai de Foi, d'Espérance, d'Amour, de patience et de courage, en criant vers le paradis, et néanmoins, aucune assurance que mes cris soient entendus." Aussi sa santé se détériora-t-elle rapidement, et en 1655, Nicolas Barré fut envoyé au couvent d'Amiensil sera sacristain pendant deux ans et où il se rétablira, avant de partir pour Rouen. Plus tard il écrira, parlant de cette épreuve: "Cette nuit est un excellent jour, on y voit tout sans rien y voir, on y sait tout sans rien savoir, on y possède tout sans crainte... »

Incontestablement, c'est au cœur de sa propre expérience que Nicolas Barré puisera son talent exceptionnel de guide spirituel des personnes éprouvées dans leur Foi. En effet, brisé par les épreuves qu'il sut traverser sans lâcher la main de Dieu apparemment absent, il comprit que Dieu le préparait à une nouvelle mission. En 1659, et malgré sa santé encore fragile, il fut envoyé à Rouen pour y prêcher des missions populaires qui amenèrent très vite un grand nombre de personnes de tous milieux à le solliciter pour la direction spirituelle.

Nicolas Barré avait également le don de lire dans les cœurs, et il obtint tant de transformations profondes et de conversions, que dans la ville, lorsqu'on parlait d'un mécréant, on disait : "Il faudrait le conduire au Père Barré".

À Rouen, de 1659 à 1675, Nicolas Barré, œuvra également pour l'éducation des enfants pauvres, en compagnie de quelques jeunes filles qui s'organisèrent pour être totalement disponibles à leur mission éducative. En effet, au cours de ses Missions, Nicolas avait été souvent touché par la misère et l'abandon moral dans lesquels se trouvaient les enfants et les jeunes des quartiers populaires. La plupart, surtout les filles, ne savaient ni lire ni écrire, et, bien que baptisés, n'avaient aucune formation chrétienne. Dès leur jeune âge, ces jeunes travaillaient, mendiaient, volaient, ou étaient livrés à la prostitution. Aussi, lors d'une mission prêchée à Sotteville-les-Rouen en 1662, Nicolas Barré communiqua-t-il son inquiétude à quelques jeunes filles et jeunes garçons qu'il invita à se mettre, au service de la jeunesse et de l'enfance à l'abandon. Ce fut le départ de son œuvre, en 1669: l'ouverture d'écoles gratuites, de catéchismes, d'ateliers, ainsi que de l'alphabétisation et de la formation chrétienne des femmes.

Nicolas, avec une grande intelligence, voulait combattre la malédiction de la pauvreté par une solide éducation qui remédierait au manque de formation humaine et spirituelle. Car, affirmait-il constamment, tous les êtres humains ont été créés à l'image de Dieu; et il disait aussi que non seulement Jésus s'était fait homme, mais aussi petit enfant, afin que les plus humbles puissent connaître son amour.

Pour réaliser son œuvre, Nicolas Barré réunit celles qui voulaient travailler avec lui dans une communauté laïque, sans vœux religieux, pour le seul service de l'Évangile et des pauvres. Il commença son œuvre après avoir longuement prié et vérifié que son inspiration venait de l'Esprit Saint. De leur côté, les femmes qu'il avait formées répondirent: "Oui. Nous le voulons et nous nous abandonnons à la divine Providence en total désintéressement". Ce furent les premières Sœurs de la Providence de Rouen. Cette communauté, pleine de zèle, d'amour pour les pauvres, de désintéressement et d'humilité, selon les conseils de son fondateur, se développera dans toute la France, pendant la vie de Nicolas Barré, lequel connaîtra bien des oppositions et des incompréhensions, y compris dans l'Ordre des Minimes.

Il convient de noter ici que Nicolas Barré contribua beaucoup à la formation de Nicolas Roland qui, à Reims,  fondera, en 1670, les Sœurs de l'Enfant Jésus. Nicolas Roland, qui deviendra le père spirituel de saint Jean-Baptiste De La Salle, ira même rencontrer Nicolas Barré à Rouen. À plusieurs reprises Nicolas Barré sera consulté par Jean Baptiste de la Salle qui s'était rendu compte de la difficulté, pour des jeunes gens, à durer dans la profession de maître d'écoles populaires. Avant lui, en effet, Nicolas Barré, n'avait pu réaliser, avec ceux qui s'étaient engagés dans cette action éducative, une communauté comparable à celle qu'il avait réalisée avec ses jeunes femmes. C'est pourquoi il conseilla à Jean Baptiste de faire lui-même les choix radicaux qui seront décisifs dans la fondation des Frères des Écoles Chrétiennes: renoncer à tous ses biens, et partager la vie de ces pauvres maîtres d'école si méprisés. Il lui enjoignit de "renoncer à tous ses biens et de vivre pauvre avec les maîtres d'école, pour réussir comme les premières maîtresses charitables avaient réussi auprès des filles".

Sans se laisser arrêter par la maladie, ni par le sentiment profond de sa propre pauvreté, Nicolas Barré continua d'accompagner, d'éclairer, de fortifier ceux et celles qui venaient chercher auprès de lui la lumière. Il écrivit: "Souvent un directeur reçoit beaucoup de lumières et de dons célestes pour les répandre sur les âmes. Il est riche des biens d'autrui. Et si on séparait ce qui lui est donné pour les autres d'avec ses grâces et ses vertus personnelles, il se trouverait presque tout nu et pauvre et misérable... Mais quand on s'oublie soi-même pour travailler au salut du prochain, si Dieu nous y appelle, Il prend un soin particulier de la personne qui se sacrifie au service des âmes."

En 1675, Nicolas Barré revint à Paris où il continua ses fondations d'écoles populaires et de communautés, comme les Maîtresses Charitables du Saint-Enfant Jésus, dites aussi Dames de Saint-Maur. Rapidement l’œuvre de Nicolas Barré, et surtout, l'esprit qui l'inspirait, devint une référence. De 1675 jusqu'à sa mort en 1686, Nicolas Barré, à Paris, poursuivit la même mission qu'à Rouen, soutenant ceux qui voulaient créer des écoles populaires. Il fut aussi un directeur spirituel très compétent auprès des personnes éprouvées par des peines intérieures, et un prédicateur ardent de l'Évangile.

Nicolas Barré mourut le 31 mai 1686 à Paris. Apprenant son décès, des foules se précipitèrent jusqu'à son couvent au quartier du Marais, en s'écriant: "le saint des Minimes est mort! "

Il fut béatifié à Rome le 7 mars 1999, par le pape Jean-Paul II. Sa fête a été fixée au 21 octobre, anniversaire de sa naissance.

Quelques mots sur la spiritualité de Nicolas Barré.

Nicolas Barré écrira: "L'Institut des Écoles charitables est comme l'Église: il avancera au milieu des persécutions et des contradictions; et tout ce qui semblera le détruire, c'est ce qui l'établira et l'affermira davantage. Il faut être dans l'abandon à Dieu pour ce dessein et tout attendre de lui avec confiance."

Aux jeunes femmes de plus en plus nombreuses, et aux quelques jeunes gens qui venaient s'offrir pour le service éducatif des enfants pauvres, il apprit à puiser dans la contemplation du "Dieu fait homme et même petit enfant", l'amour, la patience, le courage, le désintéressement et la liberté intérieure nécessaires aux éducateurs. À la communauté que formaient les "Maîtresses charitables" dispersées dans la plupart des régions de France, il donnait un minimum d'organisation, mais aucune sécurité matérielle qui aurait pu en assurer la durée, car, disait-il, "II ne faut pas la faire dépendre des moyens ordinaires à la sagesse et à la prudence humaine".

Dans sa dernière lettre, il laissa un message d’espérance à ses disciples inquiets de l’avenir de la fondation, si fragile sans aucun des moyens susceptibles d'assurer matériellement sa sécurité. Dans cette lettre, il leur disait entre autre:

"Quoi qu’il arrive, soyez toujours en paix et confiez-vous en Dieu; il vous sera fait selon votre Foi, votre Espérance et votre Charité, et encore par-delà."

Paulette Leblanc

 

pour toute suggestion ou demande d'informations