Il est
impossible de séparer Michele Rua de saint don Bosco,
dont il fut le premier successeur. Michele Rua, petit
dernier d'une famille de neuf enfants, naquit à Turin le
9 juin 1837. Son père, Giovanni Rua, qui était
contrôleur à la Manufacture d'armes de Turin, décéda le
2 août 1845; Michele n'avait que huit ans. Sa maman,
Giovanna Maria Battista, devenue veuve, put conserver
son logement à l'intérieur de la Manufacture, ou elle
fut employée. Deux mois environ après le décès de son
père, un dimanche, Michele entra dans le déjà célèbre
patronage de don Bosco. Curieusement don Bosco mit sa
main sur la tête de Michele en le regardant longuement,
et il l'accueillit immédiatement.
Nous
connaissons tous l'histoire du patronage de don Bosco.
Comme personne ne voulait l'accueillir longtemps, à
cause du bruit que faisaient les enfants lorsqu'ils
jouaient, don Bosco allait d'un endroit à un autre,
jusqu'au jour où il put s'installer définitivement au
Valdocco, le 13 avril 1846, dans un quartier pauvre de
Turin. Michele fut immédiatement conquis par la bonté de
don Bosco, qui était pourtant déjà l'objet de nombreuses
critiques: on le prenait pour un fou… Évidemment, ceux
qui aiment trop leur prochain malheureux sont souvent
traités de fous… Mais don Bosco poursuivait son œuvre,
et Michele était tellement heureux avec lui qu'il le
considérait comme son nouveau père!
Malgré
toutes les critiques et les obstacles rencontrés,
l'œuvre de don Bosco se développait rapidement. Aussi
voulut-il trouver puis former, dans ses groupes de
jeunes, de jeunes chefs capables d'encadrer leurs
compagnons, et de l'informer, lui don Bosco. En 1850,
don Bosco demanda brusquement à Michele qui avait 13
ans:
– Que
comptes-tu faire l'année prochaine?
– Entrer
à la Manufacture pour aider maman qui s'est tant
sacrifiée pour nous.
– Cela
ne te sourirait-il pas de poursuivre tes études pour
devenir prêtre; qu'en dirais-tu?
– Je
dirais oui, tout de suite. Mais maman... qui sait?
– Essaie
de lui en parler: tu me diras ce qu'elle en pense.
Contre
toute attente, la maman répondit:
– Te
voir prêtre, ce serait le plus grand bonheur de ma
vie... Dis à don Bosco que je consens pour cette année,
à titre d'essai.
L'adolescent annonça cette bonne nouvelle à Don Bosco
qui mit la main sur son épaule, tout en le regardant
avec un regard plein d'espérance. Nous voici en 1852.
Michele va entrer à l'oratoire saint François de Sales,
du Valdocco, c'est-à-dire dans l'organisation
communautaire destinée à faire progresser
spirituellement son fondateur et ses collaborateurs par
l'éducation et la formation professionnelle des jeunes
très pauvres. Deux ans plus tard, Michele Rua faisait
partie des premiers jeunes à qui don Bosco proposera de
former avec lui la Société salésienne.
Devenu
prêtre, le 28 juillet 1860, Michele Rua est toujours aux
côtés de don Bosco. Il sera son vicaire, c'est-à-dire
son principal collaborateur à partir de 1865, si bien
qu'à la demande expresse de don Bosco, le Pape Léon XIII
le destina, en 1884, à succéder au Fondateur et le
confirmera comme Recteur majeur en 1888, après le décès
de don Bosco le 31 janvier 1888.
Considéré
comme la Règle vivante des Salésiens pour sa fidélité et
son austérité, don Rua faisait preuve d'une paternité
pleine de délicatesse, envers tous ceux qui
l'approchaient. Par son action éclairée et parfois
hardie sur le plan social, il poursuivra l'œuvre de don
Bosco. Ainsi, il équipera les oratoires de gymnases et
de cercles sociaux; il devancera les lois de l'État pour
doter les écoles professionnelles de programmes adaptés.
Enfin, parallèlement à l'enseignement habituel dit
classique, il instituera l'enseignement technique et
commercial et ouvrira des pensionnats. Le succès de
l'œuvre de Michele sera tel qu'il y aura des salésiens
presque partout dans le monde. Ainsi, quand il mourut, à
73 ans, le 6 avril 1910, la Société était passée de 773
à 4.000 salésiens, de 57 à 345 Maisons, de 6 à 34
Provinces dans 33 pays.
Notons que,
au cours de ses longs voyages de visite aux œuvres
salésiennes, Michele encourageait et réconfortait ses
confrères salésiens, en faisant appel à leur Fondateur,
disant: "Don Bosco disait ... Don Bosco faisait ...
Don Bosco voulait ..." Incontestablement, ainsi que
l'affirmera le pape Paul VI au cours de la béatification
de Michele Rua, le 29 octobre 1972: "La Famille
salésienne a eu en Don Bosco son origine, et en don Rua
sa continuité." Et Paul VI poursuivra: "Michele
Rua a fait de l'exemple de don Bosco, une école, de sa
Règle un esprit, de sa sainteté un modèle. Don Rua a
inauguré une tradition."
Paulette
Leblanc |