Connaissez-vous Michel Rua? Ce nom vous dit-il quelque
chose? Peut-être, mais ce n'est pas sûr… Au moins, vous
savez que don Rua fut le 1er
successeur de Don Bosco… Mais en dehors de ça…
Michel
Rua, Michele Rua en italien, naquit le 9 juin 1837, près
de Turin, dans le quartier du Valdocco. Don Bosco qui
sera son futur supérieur avait alors 22 ans. Le père de
Michele, Jean-Baptiste, était contrôleur dans la
Manufacture d’Armes de Turin. Resté veuf avec 5 enfants,
il s’était remarié avec Jeanne-Marie Ferrero qui lui
donna quatre autres enfants. Michele était le dernier de
toute la tribu. Malheureusement quatre de ses frères et
sœurs moururent jeunes. Puis, ce fut son Père,
Jean-Baptiste, qui décéda le 2 août 1845. Veuve, son
épouse, Mme Rua put garder le logement que sa famille
occupait à l'intérieur de la Manufacture.
Dès
le début de ses études primaires, Michele se fit
remarquer par son intelligence, son application et son
goût pour les cérémonies religieuses. Bientôt sa mère le
fit entrer à l'école des Frères des Écoles Chrétiennes.
C'est alors qu'il rencontra Don Bosco, confesseur des
élèves, en septembre 1845, un mois après le décès de son
père; Michele qui avait 8 ans fut séduit par ce jeune
prêtre. Un dimanche de l'automne 1845, Michele poussa la
porte du patronage de Don Bosco qui l'accueillit
chaleureusement. Michele fréquenta alors le plus souvent
possible l'Oratoire de Don Bosco qui était alors hébergé
chez la Marquise Barolo.
Petite remarque: l'Oratoire de don Bosco était comme un
centre d'accueil, un groupe de formation religieuse de
jeunes le plus souvent très délaissés. D'où les
réticences de la maman de Michele qui avait peur de voir
son fils côtoyer "les garçons de Don Bosco". De
plus Don Bosco était déjà très critiqué, voire calomnié,
car on le croyait fou. En effet, on ne comprenait pas
qu'il s'occupe de ces pauvres enfants qui, disait-on,
deviendraient bientôt de grands bandits. Et comme
personne ne voulait recevoir ces enfants trop bruyants,
don Bosco était obligé de se déplacer continuellement,
errant de lieu en lieu avec ses garçons. Enfin, le 13
avril 1846, le patronage put s'installer définitivement
au Valdocco, dans la banlieue de Turin.
Quant il eut treize ans,
en 1850, Michele songea à entrer à la Manufacture
d'armes pour gagner sa vie et venir en aide à sa mère.
Mais Don Bosco lui demanda s’il ne voulait pas apprendre
le latin pour devenir prêtre. Michele accepta… Dès lors,
Michele s'efforça de rencontrer don Bosco aussi souvent
que possible. Le 5 juin 1852 Don Bosco réunit les
meilleurs des jeunes assistants du patronage, dont
Michele Rua qui n'avait que 15 ans. Don Bosco leur parla
d’un projet d’association dont le but serait
"de travailler au bien des
jeunes qui fréquentaient le Patronage".
À
l’automne 1852, Michele devint interne à l’Oratoire et
Don Bosco lui dit:
— Mon cher Rua, voici que commence pour toi une vie
nouvelle. Sache-le, il faudra traverser la Mer Rouge et
le désert. Si tu le veux, nous ferons toi et moi cette
traversée ensemble et nous arriverons en Terre Promise.
Le
26 janvier 1854, Don Bosco réunit Michele Rua (17 ans),
Jean Cagliero, Rocchetti et Artiglia pour leur proposer
de "s’exercer à la pratique de la charité, puis de se
lier par une promesse qui, plus tard, pourrait prendre
la forme de vœux". Ceux qui adopteraient ce genre
d’apostolat seraient appelés "Salésiens", en
l'honneur de Saint François de Sales que don Bosco
aimait beaucoup. Au sein de l’Oratoire, Don Bosco confia
l’assistance des élèves, le catéchisme, la bibliothèque
et son secrétariat à Michele Rua. Le 25 mars 1855,
Michele fut le premier Salésien à prononcer les 3 vœux
privés: la pureté, la pauvreté dans le don de soi, et
l’obéissance à la suite de Don Bosco. Malheureusement
plusieurs des collaborateurs de Don Bosco
l'abandonnèrent, notamment en raison des attaques et des
calomnies auxquelles don Bosco était constamment
victime. Mais Michele restait fidèle, et, malgré sa
jeunesse, il n'avait que 18 ans, il réussissait à
remplir toutes les fonctions qui lui étaient confiées,
en plus de ses études de théologie, lesquelles durèrent
de 1855 à 1860. Mais Michele, en plus de toutes ses
autres fonctions, donnait aussi des cours de math, de
latin, de grec… Avec don Bosco, il ne fallait jamais
perdre son temps…
En
1858, Don Bosco demanda à Michele de l'accompagner à
Rome; comme assistant, pour présenter au Pape Pie IX,
qui les approuva, ses "Règles de la Société
Salésienne". Le 18 décembre 1859, la Congrégation
Salésienne était officiellement fondée. Le Fondateur
était reconnu comme Supérieur Général de la nouvelle
Congrégation. Quant à don Michele Rua, il était nommé
directeur spirituel de la Société. Notons que Michele
Rua fut ordonné prêtre le 29 juillet 1860: il avait 23
ans.
Je
dois vous dire pour information, que l’approbation
définitive de la Congrégation Salésienne fut donnée par
Rome en 1869. Mais, auparavant, le 20 octobre 1863, eut
lieu l'ouverture d'un nouveau collège, le collège de
Mirabello, petite ville située à environ 100km de Turin.
Michele en fut nommé le Directeur. Don Bosco lui donna 5
jeunes collaborateurs, dont 4 avaient à peine 20 ans.
Pour veiller à la lingerie et accompagner sur le plan
matériel l'œuvre naissante, c'est la maman de Michele
qui fut choisie. Mais don Bosco donna aussi quelques
conseils très précieux à Michele, donc à la petite
équipe, conseils dont vous trouverez l'intégralité à la
fin du texte écrit accompagnant cet enregistrement.
Don
Rua à Mirabello se comporta comme Don Bosco à Turin,
toujours entouré par des jeunes attirés par son
amabilité et parce qu’il avait toujours des choses
nouvelles à leur raconter. Mais deux ans plus tard, en
1865, Don Rua dut revenir à Turin afin d'assurer la
fonction de préfet d’une maison de 700 élèves: le
Valdocco. En effet, l'esprit de la grande maison du
Valdocco, patronage sur lequel s'était greffé un
internat, avait fléchi. Avec un doigté remarquable, don
Rua résorba lentement les mauvaises habitudes et
restaura la discipline. De plus, Michele devait assurer
la surveillance des travaux de construction de l’église
Marie-Auxiliatrice, et de l’administration de la revue
"Lectures Catholiques". Pendant les nombreuses et
longues absences de Don Bosco, c’est sur Michele que
reposait la bonne marche de l’Oratoire.
En
1869 don Rua, âgé de 32 ans, fut chargé de la formation
des novices salésiens. En 1872, en tant que Préfet
Général de la Société, il reçut la mission de répartir
le personnel entre les différentes maisons, qu’il devait
visiter régulièrement. Il se vit également confier la
direction générale de l’Institut des Filles de
Marie-Auxiliatrice. En 1885, à la demande du Pape Léon
XIII, Don Bosco choisit Don Rua qui avait alors 48 ans,
comme Vicaire du Fondateur Salésien avec droit de
succession. En effet, la santé de Don Bosco déclinait
sérieusement. Le 31 janvier 1888 Don Bosco décédait, ce
qui toucha profondément Michele Rua. Le 5 février 1888,
Don Rua écrivit une lettre annonçant la mort de Don
Bosco et relatant ses derniers moments.
Mais
la vie continuait, et, au cours de chaque printemps, de
1889 à 1909, Michele devait partir pour un voyage
d'environ trois mois, afin de visiter chacune des
communautés. Outre ses souffrances physiques, déjà très
lourdes, don Rua dut affronter de grandes souffrances
morales: assassinat, en 1895, d'un prêtre salésien, don
Dalmazzo, par un élève, mort de Mgr Lasagna et de quatre
religieuses de Marie-Auxiliatrice, lors d'un accident
ferroviaire, destruction en 1899 d'une importante maison
en Argentine par des inondations, fermeture de tous les
établissements salésiens en France, suite à la Loi du 2
juin 1901, et, enfin, en 1907, une incroyable tempête de
calomnies. Mais sa dernière et plus grande peine fut la
mort de neuf religieux et de quarante enfants, lors du
tremblement de terre qui détruisit la ville de Messine,
en 1909.
À l'automne de 1909, don
Rua, épuisé, dut s'aliter, et le 6 avril 1910, vers
9h30, il rendit son âme à Dieu après avoir murmuré une
oraison jaculatoire que lui avait apprise Don Bosco:
"Sainte Vierge, ma tendre Mère, faites que je sauve mon
âme!" Puis il ajouta:
"Oui, sauver son âme,
sauver son âme, c'est tout, c'est tout!"
Don
Michele Rua fut béatifié par le Pape Paul VI, le 29
octobre 1972. Sa fête est le 28 ou le 29 octobre pour la
Famille salésienne. La famille religieuse salésienne
s'était incroyablement multipliée sous la direction de
Don Rua. À sa mort il laissait 4000 religieux répartis
dans 341 maisons et dans 30 nations.
Remarque importante.
Don Michele Rua dut faire face, toute sa vie, aux
innombrables travaux qui lui étaient confiés. Cela, il
le pouvait, grâce à son esprit aussi ordonné que
méthodique, à la maîtrise de ses nerfs, à sa mémoire
prodigieuse, à son acharnement au travail, à sa capacité
à se faire aider, mais surtout parce qu'il aimait don
Bosco et voulait le soulager. Mais quand priait-il? Tout
simplement en faisait de ses journées une prière
continuelle. Ses œuvres, ses soucis, ses fatigues, il
les transformait en prière, ses actions se déroulaient
sous le regard de Dieu et de Marie, et du Sacré-Cœur.
Car don Michele Rua avait une ardente dévotion envers le
Sacré-Cœur de Jésus. Don Rua écrivit à ses fils:
"La dévotion au
Sacré-Cœur de Jésus est tout ce qu'il y a de salésien,
car c'est au Cœur Sacré de notre Maître que nous irons
puiser, comme éducateurs, l'amour très pur de la
jeunesse, la douceur et la mansuétude qui doivent
accompagner nos paroles et nos actions, la patience dans
les contrariétés et les tribulations inhérentes à notre
tâche, l'esprit de sacrifice et le zèle des âmes."
Conseils donnés par don Bosco à Don Rua et à la petite
équipe qui l'accompagna à Mirabello
"Tous les matins une oraison mentale; tous les jours une
visite au Saint-Sacrement. Ne te laisse démonter par
rien.
Évite les privations dans le manger, et ne dors jamais
moins de six heures par nuit. Ce minimum est nécessaire
pour garder la santé et travailler au bien des âmes.
Tous les matins une oraison mentale; tous les jours une
visite au Saint-Sacrement.
Cherche à te faire aimer avant de te faire craindre. Si
l'on vient accuser quelqu'un auprès de toi, essaye de
voir clair avant de prendre une décision. Tu
t'apercevras que la poutre n'est souvent qu'un fétu de
paille.
Fais en sorte que ton personnel ne manque de rien pour
la nourriture comme pour le repos. Tiens compte des
fatigues de tes confrères. S'ils tombent malades, ou
simplement s'ils sont indisposés, fais-les tout de suite
remplacer.
Cause souvent, en particulier ou en public, avec tes
confrères. Aie l'œil pour qu'ils ne soient pas trop
chargés d'occupations; qu'ils ne manquent de rien,
habits ou livres. Observe s'ils ont des chagrins, ou
quelque souffrance physique, ou du fil à retordre avec
leurs élèves. Dès qu'un de leurs besoins t'est connu,
satisfais-le. Veille à la ponctualité du personnel et
que tous prennent leur récréation avec les élèves.
Réunis quelquefois les professeurs, les surveillants,
les chefs de groupe et recommande-leur d'empêcher les
discours mauvais, et d'écarter tout livre, toute
gravure, tout élève dangereux pour la pureté des mœurs.
Autant que possible prends ta récréation avec les élèves
et profite de ce moment pour leur glisser une bonne
parole à l'oreille.
Fonde la Compagnie de l'Immaculée Conception, mais
laisses-en la direction à ses propres membres.
La bonté et la gentillesse doivent être les vertus
caractéristiques d'un directeur, tant à l'égard des
personnes du dedans que de celles du dehors.
En face d'une difficulté d'ordre matériel, cède le plus
que tu peux, même au prix de quelque chose: l'important
est de conserver la charité.
S'il s'agit de difficultés d'ordre spirituel ou moral,
alors le désaccord doit toujours se résoudre au profit
de la plus grande gloire de Dieu et du salut des âmes.
Tout doit être sacrifié à ce double bien: engagements,
exigences d'amour-propre, goûts personnels, prétentions,
jusqu'à l'honneur lui-même"
Paulette Leblanc |