La vie
religieuse des chrétiens catholiques, c'est surtout
l'Eucharistie qui est une authentique relation avec Jésus
vivant. Mais exprimer cette relation avec Dieu, pour
éventuellement la partager avec d'autres, cela est très
difficile. Trop souvent on nous dit encore qu'il n'est pas
nécessaire de “sentir Dieu” sans jamais dire de quoi il
s'agit. Il en résulte des erreurs, des contresens souvent
dangereux, et pour mieux me faire comprendre, je dois
d'abord vous expliquer que les personnes qui disent qu'on
n'a pas besoin de sentir Dieu ne savent généralement pas de
quoi elles parlent.
Tout
d'abord, “sentir Dieu” n'est pas une sensation charnelle.
Certes, nous sommes tous des êtres de chair, et qui plus
est, pécheurs; mais Dieu nous a donné aussi une âme
spirituelle, et Il nous aime. Il nous aime tellement qu'Il a
voulu incarner sa Parole, son Verbe, dans un corps d'homme
semblable au nôtre. Et Jésus, Verbe de Dieu incarné, a vécu
avec nous et comme nous, ressentant dans son Être humain
l'intensité de nos misères. Puis, comme Il devait remonter
vers le Père, Il a voulu rester présent chez nous, au milieu
de nous, par son Eucharistie.
L'Eucharistie, Corps du Christ livré pour nous, Sang du
Christ versé pour nous, c'est réellement Jésus toujours
présent pour chacun de nous comme Il l'avait promis
lorsqu'Il disait: “Voici que je suis au milieu de vous
jusqu'à la fin des temps”. Oui, Jésus est là, vivant
dans son Eucharistie puisqu'Il a dit encore: “Lorsque
deux ou trois sont réunis en mon Nom, Je suis au milieu
d'eux.” Et chaque fois que nous communions, il y a
toujours au moins deux personnes: le prêtre et le
communiant. Parfois Jésus nous comble de son amour, et cela
arrive de plus en plus souvent, surtout aux personnes, qui
converties ou revenues de leurs erreurs, communient ou re-communient,
pour la première fois. Alors, la présence de Dieu dans
l'Eucharistie devient comme “sensible”; mais le corps n'a
rien à voir là-dedans. Je dois ajouter que les mystiques
parlent souvent de la joie que Jésus ou la Vierge Marie leur
procurent; mais, curieusement, ils disent tous qu'ils ne
savent pas s'exprimer. Les mystiques parlent aussi de la
souffrance de Jésus pendant sa Passion à laquelle Dieu leur
fait la grâce de les associer; mais là non plus, ils ne
savent pas exprimer ce qu'ils ont vécu. En effet, notre
vocabulaire est bien pauvre pour exprimer la vie
spirituelle...
Quant
aux personnes qui ont l'habitude de pratiquer régulièrement
leur religion, en se confessant, en communiant très
régulièrement, il peut arriver que, dans certaines
circonstances, leur cœur soit parfois tellement associé à la
douleur du Christ, pendant son Chemin de Croix notamment;
qu'elles ne peuvent s'empêcher de pleurer.
D'une
manière générale, nous n'avons pas de mot pour exprimer nos
relations avec Dieu. De plus, les expériences mystiques des
grands saints, voire de certaines personnes qui reçoivent
des grâces spéciales, les expériences mystiques ne sont pas
expérimentales, donc pas reproductibles selon nos critères
humains. Dieu seul agit, et seulement quand Il le veut, à sa
façon à Lui et dans son monde à Lui. Tout vient de Dieu qui
agit en nous, mais dans son monde à Lui, son monde
inexprimable avec nos mots humains, un monde en dehors de la
seule création visible et sensible que nous pouvons
appréhender.
Je
reviens à la Présence réelle de Jésus, Verbe de Dieu, dans
la Sainte Eucharistie. Jésus agit en chaque communiant, mais
dans son monde à Lui, tout en influençant sa créature pour
la conduire vers ses désirs divins: l'amour pour Lui,
Dieu-Amour, et l'amour pour notre prochain, le service de
nos frères, et cela dans une grande humilité. Quand Dieu
rencontre l'homme et le prend pour Lui et en Lui, alors
l'homme ne sait plus quoi dire: il aime, ou, s'il est encore
trop faible, il apprend à mieux aimer. Et l'homme se tait,
dans une adoration inexprimable, dans une sphère nouvelle
pour Lui où il peut “sentir” Dieu et vivre pendant quelques
instants dans la divinité...
Pour
essayer de me faire mieux comprendre, je vais vous rapporter
quelques expressions dîtes par des convertis qui commencent
toujours par dire: “J'ai senti, ou j'ai rencontré Dieu…”
mais qui, ensuite, cherchent à s'expliquer. Voici: on ne
“sent” pas Dieu; on “baigne” en Lui. Dieu nous “emplit”,
mais pas corporellement; nous sommes “perdus” en Lui et nous
ne comprenons rien... C'est vrai, nous ne comprenons rien
si nous restons au niveau terrestre; car, même sur le plan
intellectuel, les “choses” de Dieu ne sont pas de la terre.
L'intellectuel, en effet, pour nous qui sommes encore sur la
terre, c'est toujours du terrestre, du charnel. Alors,
comment s'en sortir, comment quitter le charnel et entrer
dans un autre monde, le monde spirituel? Répondre à cette
question relève de l'impossible, et pourtant, dans
l'Eucharistie, c'est bien le Seigneur qui vient à notre
rencontre, qui nous "parle", qui nous montre son amour et
notre misère, surtout lorsque l'on a manqué à la charité, à
l'amour qui est son commandement fondamental.
Jésus-Eucharistique, c'est Jésus vivant, c'est Jésus qui
nous aime et qui vient nous aider… Jésus-Eucharistie, c'est
aussi Jésus que nous devons aimer, écouter. C'est Jésus
vivant qui nous fait comprendre que nous devons faire tout
ce qu'Il nous dit.
Paulette
Leblanc |