Malgré quelques légendes qui se sont associées à la vie
de Saint Corentin 1er évêque de Quimper,
Corentin a bien existé. Sa vie a été racontée dans La
vita de Saint Corentin, publiée vers 1220-1235.
Cette Vita de Saint Corentin a fait l'objet de
plusieurs commentaires rectificatifs, de mises à jour et
de compléments. Saint Albert le Grand (1200-1280) se
serait aussi préoccupé de la vie de saint Corentin.
Curieusement, aucune ville de Bretagne ne porte le nom
de Corentin, sauf Quimper dont le vrai nom est
Quimper-Corentin. Pourtant, je vous le redis, malgré
toutes les légendes qui lui sont liées, saint Corentin a
bien existé.
D’après
Albert le Grand, Corentin serait né vers 375, en
Cornouaille armoricaine où son père, celte d'Irlande, se
serait établi. Corentin reçut une très bonne éducation
grâce, notamment, à la présence d'un moine, tout près de
chez ses parents. Très intelligent, Corentin acquit tout
ce qu'on pouvait savoir à son époque, ainsi qu'une
authentique spiritualité. Puis Corentin devint prêtre.
Il exerça d'abord son saint ministère parmi les
populations d'émigrés bretons. Mais son désir de
perfection au service de Dieu était si grand en lui
qu'il se retira dans un ermitage de la paroisse de
Plomodiern au pied de la montagne du Menez, les
Montagnes Noires.
Corentin se bâtit un humble ermitage près d'une fontaine
et éleva un petit oratoire dans lequel il priait très
longuement, le jour et la nuit. Sa nourriture était si
frugale que Dieu lui envoya un jour un petit poisson
qu'Il plongea dans la fontaine. Tous les matins, le
petit poisson se présentait à l'ermite qui le saisissait
et en coupait un petit morceau pour sa nourriture. Puis
Corentin rejetait le poisson dans l'eau qui,
instantanément, se retrouvait sans aucune blessure.
Et
voici une autre aventure liée à Saint Corentin: quelque
part en Cornouaille, dans la forêt de Névet, vivait un
autre saint prêtre, un vieillard nommé Primel, lequel
menait une vie aussi pieuse et mortifiée que Corentin.
Un jour, Corentin alla le voir. Ils prièrent longuement
ensemble. Le lendemain matin, Corentin voulut dire la
messe dans l'oratoire de saint Primel qui alla chercher
de l'eau dans sa fontaine très éloignée. Primel revint
si fatigué que, pris de pitié, Corentin supplia le
Seigneur de donner à Primel une source proche de son
ermitage. Tout de suite après la messe, là où Corentin
planta son bâton, une source d'eau vive jaillit. Après
avoir passé quelques jours avec Primel, Corentin rentra
dans son ermitage de Plomodiern.
Ce
qui suit est-il vrai ou encore légende? Peu importe.
Sachons simplement que le Roi Grallon (ou Gallon),
successeur du roi Conan Meriadek, habitait avec sa cour
dans la ville de Kemper-Odetz, capitale de la
Cornouaille. Au cours d'une partir de chasse, Gallon
s'égara dans la forêt où se trouvait l'ermitage de
Corentin. Lui et ses chasseurs, affamés, s'adressèrent à
l'ermite qui les rassasia. Pour cela, dit la légende,
Corentin découpa un morceau de son ami, le petit
poisson, et le donna au cuisinier qui commença par se
moquer. Mais ce petit morceau de poisson se multiplia
tellement que tout le monde mangea à sa faim et le roi
Gallon voulut voir le poisson; émerveillé, le roi Gallon
se prosterna aux pieds de l'ermite et lui donna sa forêt
et une maison qu'il possédait à Plovodiern. Corentin
transforma cette maison en monastère où vécurent de
nombreux et saints moines. Ici, je dois vous dire que ce
poisson est devenu l'emblème iconographique de saint
Corentin.
Voici une autre version du miracle:
La
réputation de sainteté de Corentin était telle en
Bretagne, que quelques hauts personnages vinrent le
visiter en son ermitage; saint Corentin les reçut
aimablement, et, pour les nourrir, leur fit des crêpes
avec le peu de farine qu'on lui avait donnée. Pour cela,
Corentin, alla puiser de l'eau à la fontaine, et, contre
toute attente, il la trouva pleine de belles et grosses
anguilles. Il en prit quelques-unes pour nourrir ses
hôtes, lesquels se retirèrent ensuite en louant Dieu
qui, par ses miracles, témoignait de la Sainteté de son
serviteur Corentin.
Revenons aux œuvres de notre Corentin. Les besoins
concernant les enfants et les jeunes étaient alors
immenses. Aussi Corentin transforma-t-il une partie du
monastère en école destinée aux enfants des principales
familles de la région. Passèrent dans cette école
Guénolé, Tudy et Jacut qui devinrent les abbés des trois
célèbres monastères de Bretagne.
Les
émigrés qui s'étaient établis en Bretagne avaient
constitué des villages et des paroisses. En même temps
pour les moines qui les accompagnaient, les monastères
s'étaient multipliés; ainsi, la foi avait-elle pu être
sauvegardée. Mais une organisation plus stricte était
devenue nécessaire: il fallait un évêque pour cette
chrétienté. Et le roi Gallon songea à Corentin qui dut
quitter sa chère solitude pour devenir le premier évêque
de Cornouaille. C'est l'évêque de Tours, successeur de
Saint Martin, qui donna à Corentin, la consécration
épiscopale, à Tours. Corentin consacra ensuite Guénolé
et Tudy qui l'accompagnaient. Le roi Gallon céda alors à
Corentin évêque, son propre palais de Quimper. Ici je
dois ajouter que Corentin, premier évêque de Quimper,
fait partie de ce qu'on a appelé le groupe breton des
sept saints, ses six confrères dans l'épiscopat étant:
saint Pol dans le Léon, saint Tugdual à Tréguier, saint
Paterne à Vannes, saint Samson à Dol, saint Brieuc à
Saint-Brieuc, et saint Maclou, (ou Malo) à Saint-Malo.
Tout
de suite après sa consécration, Corentin, évêque,
s'attela à l'organisation de son diocèse de Quimper,
corrigeant les abus, combattant les superstitions liées
au culte druidique. Il visita et délimita les paroisses
de son évêché. Il ordonna de nombreux et saints prêtres
à qui il prêchait l'exemple par sa vie apostolique tout
en poursuivant sa vie de moine austère. Il signa les
actes du concile d'Angers de 453. En 460, totalement
épuisé, Corentin tomba malade. Ayant compris qu'il
allait mourir, il convoqua ses chanoines et ses
religieux, et, les ayant exhortés à la persévérance dans
l'amour de Dieu et dans leur vocation, il reçut les
derniers sacrements, bénit tous ses frères présents, et
partit vers son Seigneur. C'était le 12 décembre 460.
Une
foule si nombreuse vint pour honorer son saint corps
qu'on ne put enterrer l'évêque Corentin à la date
prévue… Les malades qui vinrent aussi très nombreux,
furent guéris, ainsi que tous les infirmes: muets,
sourds, boiteux, aveugles… Et les démoniaques étaient
délivrés. Pendant longtemps, les fidèles continuèrent à
venir sur son tombeau et obtinrent de nombreux miracles.
Dès lors, son nom devint inséparable du nom de la ville
où avait été son siège épiscopal, ville qui s'appellera
désormais Quimper-Corentin, vrai nom de la ville de
Quimper. Notons aussi que de très nombreuses églises et
chapelles furent placées sous son vocable dans le
Finistère et les Côtes d'Armor. Les reliques de saint
Corentin restèrent dans sa cathédrale jusqu’à l’invasion
des Normands, vers 875. Sa fête liturgique est le 12
décembre. Remarquons aussi cependant qu'un
manuscrit d'Angers, daté de 897, place un saint Corentin
au calendrier le 1er mai. Mais est-ce le nôtre?
Paulette
Leblanc |