Charles BORROMÉE
Évêque, Saint
(2 octobre 1538-3 novembre 1584)

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NOVEMBRE

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La vie de Charles Borromée

Charles Borromée, fils du comte Gilbert Borromée, naquit le 2 octobre 1538 dans le château familial d'Arona, situé dans le Milanais, sur le lac Majeur, en Lombardie.

Charles fut d’abord confié à l'abbaye bénédictine d'Arona avant de partir à Paris et à Milan pour parfaire ses études. Malgré quelques difficultés d'expression, il se montra un élève travailleur et intelligent. Dès l'âge de douze ans, il était bénéficiaire d'une riche abbaye considérée comme un héritage de famille. Il reçut bientôt une autre abbaye et un prieuré résignés en sa faveur par le cardinal de Médicis, son oncle maternel qui devint le pape Pie IV (1559-1566).

À vingt-deux ans, titulaire d'un doctorat en droit civil et en droit canon, il fut nommé secrétaire d'État, administrateur de Milan et cardinal en 1560, par son oncle, Pie IV. Charles n'était pas encore prêtre, cependant c’est en sa qualité de cardinal qu’il fut chargé de l'administration des Romagnes et de la marche d'Ancone, de la protection de plusieurs nations étrangères: Portugal, Suisse et Pays-Bas, et de l'inspection générale des franciscains, des carmélites et des chevaliers de Malte[1].

Comme la plupart de ses charges nécessitaient sa présence à Rome, Charles fut contraint de nommer un suppléant pour gouverner Milan. Lui-même dut remplir la fonction de légat pour Pie IV à de nombreuses occasions.

Charles devait tenir son rang dans la haute société qui était celle de sa famille et de ses activités; aussi employait-t-il de nombreux domestiques; cela le gênait tellement qu’il pensa un moment démissionner et devenir moine. On le convainquit d'attendre.

1-1-La fin du Concile de Trente

Malgré son jeune âge, Charles avait déjà suffisamment d’influence sur son oncle, le pape Pie IV, pour que ce dernier fît accélérer les travaux du Concile de Trente, interrompus depuis huit ans à cause de la résistance que la cour de Rome opposait aux mesures destinées à la réforme.

En 1562, pressé par sa famille de se marier[2], Charles, qui n’avait que 24 ans, choisit la prêtrise et se fit consacrer évêque[3]. Cependant ce fut seulement en 1565 que le pape lui permit de résider dans son diocèse de Milan où il ne cessa jamais de demeurer.

En 1563, le concile de Trente se terminait enfin. Charles Borromée avait pris une part importante à la composition du célèbre catéchisme de Trente. Bientôt il institua au Vatican une académie nouvelle composée d'ecclésiastiques et de laïcs; il y faisait, le soir, des conférences, qui furent publiées sous le titre de Noctes Vaticanae.

1-2-La mort de Charles Borromée

Le zèle réformateur de Charles lui suscita de nombreux ennemis, mais toutes les tentatives pour le faire abandonner sa tâche, pour le faire partir et même... pour l'assassiner échouèrent. Il continuait de travailler sans relâche. Les années passaient, et, malgré sa fatigue, il n'arrêtait pas de s’appliquer à ses nombreuses tâches. "Pour éclairer, la chandelle doit se consumer", disait-il à ceux qui lui prêchaient le repos.

Totalement épuisé, Charles Borromée décédait le 3 novembre 1584. Il avait 46 ans.

Charles Borromée fut enterré dans sa cathédrale de Milan, et canonisé en 1610. Il avait été aimé et respecté par son peuple, pour son amour de l’Église, sa compétence, l’estime qu’il avait du savoir et des arts, et enfin et surtout pour son humilité et sa bonté.

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L’œuvre de Charles Borromée

2-1-un saint évêque

C'est avec raison que Charles Borromée a été appelé le modèle des évêques et le restaurateur de la discipline ecclésiastique. Il fit constamment preuve, durant son épiscopat d'une vertu, d'une science, d'un renoncement et d'une persévérance qui justifient complètement ces titres. Devenu archevêque de Milan, il créa des séminaires pour la formation des prêtres, conformément aux décrets du Concile et établit la congrégation des Oblats, hommes religieux voués à s'offrir et à se porter partout où les besoins de l'Église les réclamaient.

2-2-La charité de Charles

L’évêque de Milan donnait à tous l’exemple d’une vraie charité. Malgré l’énormité de sa fortune, il vivait pauvrement. Il prenait soin des pauvres, et il alla jusqu’à soigner lui-même les pestiférés quand la peste ravagea Milan en 1576.

Pendant la famine de 1570 et la peste de 1576, il déploya une activité, une charité et un dévouement qui firent l’admiration de tous ceux qui l’approchaient. C’est lui qui organisa l'aide aux victimes, et il demandait à tous les religieux de se convertir en infirmiers.

2-3-Après le Concile de Trente

2-3-1-Le rétablissement de la discipline

Le rétablissement de la discipline était une œuvre fort difficile dans la province ecclésiastique de Milan où les archevêques, depuis près de quatre-vingts ans, ne demeuraient plus dans leur résidence. Non seulement Borromée donna, le premier, le plus haut exemple de la réforme, la poussant pour lui-même jusqu'à l'ascétisme le plus rigoureux, non seulement il visitait assidûment ses paroisses, mais il tint six conciles provinciaux et onze synodes diocésains.

Il institua un conseil permanent destiné à mettre en œuvre les règlements du Concile de Trente. Mais ces réformes ne s'accomplirent point sans de vives résistances tant de la part des évêques que de la part du chapitre de la Scala qui se prévalait de ses privilèges, et même de la part des prêtres et des moines accoutumés au relâchement. Un religieux de l'ordre des Humiliés tira même sur l'archevêque devant l'autel un coup d'arquebuse, qui, heureusement,  ne fit qu'effleurer la peau. Par ailleurs Charles Borromée réorganisa l'administration, fit des visites pastorales régulières et inventa l'école du dimanche pour l'éducation religieuse des laïcs.

2-3-2-Borromée et la Suisse

Finalement Borromée triompha de toutes les oppositions. Il étendit aussi son influence sur la Suisse en fondant à Milan un séminaire helvétique destiné à former des prêtres imbus de la doctrine  catholique et romaine. Charles Borromée travailla également à la formation d’une ligue, la Ligue d'Or ou Ligue de Borromée, qui ne se réalisa qu'après sa mort... En octobre 1586, les cantons catholiques  s'engageaient à prendre les armes contre tous ceux qui toléreraient l'hérésie sur leur territoire.

2-3-3-Charles Borromée et les jésuites

Charles Borromée paraît avoir beaucoup travaillé avec les jésuites: il leur avait fait des donations considérables, et fondé pour eux un superbe collège à Milan. Il leur avait aussi procuré des maisons à Lucerne, à Fribourg et ailleurs. Son confesseur, était un jésuite. Malheureusement, quand Borromée eût été informé et convaincu de certains désordres graves chez les jésuites de Milan, il n'hésita pas à prendre les mesures nécessaires. Les jésuites scandaleux   résistèrent et se liguèrent même avec ses ennemis. Il s'ensuivit des conflits et un procès à Rome, dont l'issue fut favorable à Charles Borromée, qui était allé plaider lui-même sa cause.

Quelques textes
de saint Charles Borromée

Trois conseils de Charles Borromée

   “Aie grande confiance dans le Seigneur, il veut toujours ton bien.”

   “Exerce-toi à la connaissance de toi-même.”

   “Dans la prospérité, évite une trop forte allégresse. Elle risquerait de te faire oublier à ton âme les misères et périls existentiels.”

Charles contemple ce que Dieu a fait pour lui

“Il a mis en ma main tous ses trésors, ses sacrements et ses grâces. Il y a placé les âmes qui sont ce qu’il a de plus cher, qu’il a préférées à lui-même dans son amour, qu’il a rachetées de son sang. Il a mis en ma main le ciel pour que je puisse l’ouvrir aux autres.”

Extraits d’une Homélie de saint Charles Borromée prononcée lors de son dernier synode

Nous sommes tous faibles, je le reconnais, mais le Seigneur Dieu nous a donné des moyens où nous pouvons facilement trouver du secours si nous le voulons.

Voici un prêtre qui voudrait mener la vie irréprochable à laquelle il se sait obligé, qui voudrait être chaste et avoir la conduite digne des anges qui lui convient; mais il ne se décide pas à employer les moyens voulus: le jeûne, la prière, la fuite des relations mauvaises, des familiarités nuisibles et dangereuses.

Cet autre, lorsqu'il entre au chœur pour la psalmodie ou lorsqu'il va célébrer la messe, se plaint de ce que mille pensées se présentent aussitôt à son esprit et le distraient de Dieu. Mais avant d'aller au chœur ou de célébrer la messe, qu’a-t-il fait à la sacristie, comment s'est-il préparé, quels moyens a-t-il pris pour maîtriser son attention?

Veux-tu que je t'enseigne comment progresser sans cesse de vertu en vertu et, si tu étais déjà attentif au chœur, comment tu pourras l'être davantage une autre fois pour que tes hommages plaisent à Dieu encore plus ? Écoute-moi bien. Si un petit feu d'amour divin est déjà allumé en toi, ne le montre pas tout de suite, ne l'expose pas au vent ; garde fermée la porte du four, pour ne pas laisser perdre la chaleur. Cela veut dire : fuis, autant que possible, les distractions, demeure recueilli en Dieu, évite les conversations frivoles. Tu as la charge de la prédication et de l'enseignement ?

Étudie, applique-toi à tout ce qui est nécessaire pour bien exercer cette charge. Soucie-toi d'abord de prêcher par ta vie et tes mœurs ; évite qu'en te voyant dire une chose et en faire une autre, les gens ne se moquent de tes paroles en hochant la tête. Tu as charge d'âmes ? Ce n'est pas une raison pour négliger la charge de toi-même et pour te donner si généreusement aux autres qu'il ne reste plus rien de toi-même pour toi. Tu dois te souvenir des âmes dont tu es le supérieur, sans t'oublier toi-même.

Comprenez, mes frères, que rien n'est aussi nécessaire, pour des hommes d'Église, que l'oraison mentale qui doit précéder toutes nos actions, les accompagner et les suivre. Je chanterai, dit le Prophète, et je serai attentif. Si tu administres les sacrements, mon frère, pense à ce que tu fais ; si tu célèbres la messe, pense à ce que tu offres ; si tu psalmodies au chœur, réfléchis à qui tu parles et à ce que tu dis ; si tu diriges les âmes, songe au sang qui les a lavées.

Faîtes tout avec amour. C'est ainsi que nous pourrons vaincre facilement les innombrables difficultés que nous rencontrons nécessairement chaque jour. du fait de notre position. C'est ainsi que nous aurons la force d'engendrer le Christ en nous et chez les autres. Et souvenez-vous des paroles de l’Écriture:

– Ceux qui sèment dans les larmes, moissonnent en chantant.

– Qui sème dans sa chair moissonnera de sa chair la destruction.

– Qui sème dans l'Esprit moissonnera de l'Esprit la vie éternelle.

– La chair ne sert de rien, c'est l'Esprit qui vivifie.


[1] Charles Borromée, encore très jeune, était déjà submergé de charges honorifiques très lucratives: son revenu annuel était de 52 000 écus, soit plus de mille tonnes d'or fin.
[2] Charles était resté laïc, grand amateur de chasse et de musique de chambre. Mais la conscience de son devoir était telle qu'il s'imposait dans la vie mondaine et brillante de Rome, par sa rigueur et son travail.
[3] Au moment de la mort subite de son frère aîné, alors qu'il pourrait quitter l'Église pour la charge de chef d'une grande famille, il demande à devenir prêtre. Désormais il accomplit par vocation ce qu'il réalisait par devoir.

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