CHARLES D'AUTRICHE
empereur d'Autriche, Bienheureux
(1887-1922)

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AVRIL

Charles de Habsbourg, fils aîné de l'archiduc Otto et de Marie-Joséphine de Saxe, naquit le 17 août 1887 à Persenbeug, non loin de Vienne en Autriche. Charles était le petit-neveu de l'empereur d'Autriche François-Joseph 1er. Il grandit sous la garde de sa mère, femme très chrétienne. Par contre, son père menait une vie scandaleuse. Très jeune, Charles fut  d'abord confié à des précepteurs chrétiens.

Charles fit sa première communion en 1898, à Vienne, puis il fréquenta le lycée public des Bénédictins écossais. Là, il développa ses qualités de franchise, de charité, de ténacité et de modestie. Malgré sa faible santé, Charles progressait cependant dans les domaines, intellectuel et spirituel. Il reçut une éducation catholique approfondie, et très tôt, grandit en lui un grand amour pour l'Eucharistie et pour le Cœur de Jésus.

Charles était toujours gai avec tous ceux qui l'entouraient et il aimait beaucoup la musique. En 1905, il commença sa carrière militaire, obligatoire chez les Habsbourg, et, il fut nommé, en 1908, chef d'escadron en Bohême. En 1906, son père étant décédé, Charles devint le numéro 2, dans l'ordre de la succession au trône de l'empire Austro-Hongrois, après son oncle, François-Ferdinand, qui l'initia aux affaires de l'État. En réalité, cet empire était une double monarchie: l'empire d'Autriche et le royaume apostolique de Hongrie.

En 1909, Charles de Habsbourg rencontra la princesse Zita de Bourbon-Parme, de cinq ans plus jeune que lui, et qui avait été élève des Bénédictines de Solesmes. Charles obtint de l'empereur François-Joseph l'autorisation de l'épouser. Préparé par une retraite spirituelle, le mariage eut lieu le 21 octobre 1911, après presque deux ans de fiançailles. Ce furent dix années d'une vie conjugale heureuse, couronnées par la naissance de 8 enfants.  Curieusement, quelque temps avant le mariage, au cours d'une audience accordée à Zita, le Pape saint Pie X avait prédit aux fiancés leur prochaine accession au trône de l'empire. La princesse lui ayant rappelé que l'héritier direct du trône était François-Ferdinand et non pas Charles, le Pape maintint cependant son étonnante affirmation.

En 1912, Charles devint capitaine en Galicie; dès lors, il s'occupa activement de ses troupes afin d'améliorer leur bien-être matériel et moral. Le 20 novembre 1912, Zita donnait naissance à son premier fils, Otto. En février 1913, la petite famille s'établit au château de Hetzendorf, près de Vienne. Charles travaillait souvent très tard, s'assujettissant à toutes les contraintes de la vie des officiers.

Au début de 1914, l'archiduc héritier François-Ferdinand, oncle de Charles, fut discrètement informé que la franc-maçonnerie voulait le faire assassiner afin de détruire l'empire catholique d'Autriche-Hongrie. Effectivement, le 28 juin 1914 François-Ferdinand fut assassiné à Sarajevo par un conspirateur serbe. Charles de Habsbourg devenait donc l'héritier direct de l'empire austro-hongrois. Les relations se détériorèrent rapidement entre l'empire et la Serbie, devenant la cause de la guerre de 1914-18. Charles pressentait que ce conflit serait terriblement meurtrier, mais il ne pouvait rien faire pour l'éviter.

En novembre 1916, l'empereur d'Autriche François-Joseph mourait après un règne de 68 ans, et Charles de Habsbourg devint empereur de l'Autriche-Hongrie. Il avait vingt-neuf ans et, homme de paix, il désirait ardemment faire cesser la guerre rapidement. Malheureusement ses propositions de paix du 22 décembre 1916, aux pays de l'Entente, ou Alliés comprenant la France, l'Empire russe, l'empire britannique et, en 1917, les États-Unis, furent refusées. Charles fit d'autres propositions de paix qui échouèrent toutes.

Il faut signaler ici que dès l'avènement de Charles à la tête de l'empire, des campagnes de calomnies furent lancées contre lui… Comme il assistait tous les jours à la messe, récitait le chapelet et visitait les sanctuaires dédiés à la Vierge Marie, on le traitait aussi de bigot, et même   d'incapable alors qu'il était un officier remarquable et qu'il parlait sept langues. Au printemps 1917, il refusa de laisser Lénine, qui vivait en Suisse, traverser ses États pour aller semer la révolution en Russie. En effet, Charles avait compris que Lénine utiliserait le bolchevisme, pour ruiner, non seulement la Russie, mais aussi d'autres nations. Cependant, Lénine parvint à regagner la Russie en passant par l'Allemagne dans un train spécial.

Dans l'impossibilité de conclure la paix avec les pays de l'Entente, Charles dut continuer la guerre. En octobre 1917, l'Autriche remporta sur l'Italie la victoire de Caporetto, mais cela ne changea rien. Pendant ce temps, Zita, son épouse, se dévouait et venait en aide aux blessés et aux orphelins, en créant des œuvres d'assistance.

En mai et juin 1918, les dernières offensives allemandes furent arrêtées, et, face à une contre-offensive des Alliés, l'Allemagne se replia,  et dut, après le déclenchement de la révolution à Berlin, demander l'armistice, qui sera signé le 11 novembre 1918.

Le parlement hongrois ayant proclamé la déchéance des Habsbourgs, le 2 novembre 1918, l'empereur fut contraint de demander l'armistice à l'Italie. Les milieux politiques le poussaient à l'abdication, mais, ayant juré de maintenir l'empire, Charles ne se reconnaissait pas le droit de disposer d'une autorité reçue de Dieu. Cependant, soumis à de multiples pressions, il abandonna, à Vienne, le 12 novembre 1918, l'exercice du pouvoir, mais sans avoir abdiqué. Puis il se retira au château d'Eckartsau, en Basse-Autriche, où il fut aussitôt mis sous surveillance policière. En mars 1919, la "république autrichienne" ayant proscrit Charles 1er qui réaffirmait sa légitimité, lui et sa famille durent s'installer à Prangins, près de Genève, en Suisse. De là, encouragé par le Pape Benoît XV, Charles s'efforcera de remonter sur le trône de Hongrie afin de reformer une fédération d'États catholiques en Europe centrale. En conséquence, le 25 mars 1921, Charles quitta la Suisse et se rendit clandestinement en Hongrie. Trahi par son entourage, il fut reconduit en Suisse, manu militari. Les pays de l'Entente, les Alliés, le jugeant indésirable, l'embarquèrent le 31 octobre 1921, lui et Zita sur un bateau britannique qui descendit le cours du Danube jusqu'à la Mer Noire. Le 19 novembre 1921, le navire aborda à Funchal, capitale de l'île portugaise de Madère, qui sera le lieu d'exil de l'empereur déchu. On croyait Charles riche, mais il était très pauvre. Il vécut donc avec sa famille dans un logement insalubre. Il tomba gravement malade, mais accepta sa maladie comme un sacrifice pour la paix et l'unité de ses peuples.

Le Pape Benoît XV donna à Charles la faculté d'avoir une chapelle domestique avec la messe, et son ascension spirituelle s'accéléra, suscitant l'admiration de son épouse. Charles avait de plus en plus l'intuition que Dieu lui demandait d'offrir sa vie pour le salut de ses peuples et il confia cette pensée à Zita, en ajoutant: "...et je le ferai!" Un témoin dira: "Jamais il ne voulait apparaître martyr; jamais il n'a condamné ceux qui l'ont trahi et si, devant lui, on en médisait, il prenait leur défense."

Le 9 mars 1922, Charles tomba de nouveau gravement malade. Le 29 mars 1922, Charles, victime de deux crises cardiaques, il confiera: "N'est-ce pas excellent d'avoir une confiance illimitée dans le Sacré-Cœur? Sinon mon état serait insupportable." Le samedi 1er avril 1922, il put communier; puis le Saint-Sacrement fut exposé dans la chambre du mourant qui murmurait: "J'offre ma vie en sacrifice pour mon peuple." Et Charles ajouta: "Mon Sauveur, que votre volonté soit faite!" À midi vingt-cinq, après avoir dit "Jésus, Marie, Joseph", Charles, qui n'avait pas encore 35 ans, mourut, laissant une veuve qui attendait leur huitième enfant. Sa fête est le 1er avril, jour de sa mort, ou le 21 octobre, jour anniversaire de son mariage.

Le pape Jean-Paul II dira de lui, lors de sa béatification, le 3 octobre 2004: "Dès le début, l'empereur Charles conçut sa charge comme un service saint de ses peuples. Sa préoccupation principale était de suivre l'appel du chrétien à la sainteté même dans son action politique... Qu'il soit un exemple pour nous tous, surtout pour ceux qui ont aujourd'hui en Europe une responsabilité politique." Il est certain, en effet, que Charles  fut le seul responsable politique à soutenir les efforts de Benoît XV en faveur de la paix. Jean-Paul II dira également, au cours de l'homélie de béatification: "Arrivé au pouvoir dans la tourmente de la Première Guerre mondiale, il tenta de promouvoir l'initiative de paix de mon prédécesseur Benoît XV…  L'homme d'Etat et le chrétien Charles d'Autriche se fixa quotidiennement ce défi. Il était un ami de la paix…"

Le pape Jean-Paul II fit également allusion à l'accession au trône, en 1916, de Charles de Habsbourg, en sa double qualité d'empereur d'Autriche et roi apostolique de Hongrie, alors que le conflit fratricide incendiait déjà l'Europe et, opposait entre elles des nations chrétiennes telles que la France et l'Autriche-Hongrie. Très tôt, Charles d'Autriche avait pressenti à quel point ce premier conflit mondial annonçait, un suicide politique, démographique et moral du Vieux Continent. Jean-Paul II résuma la conduite de Charles de Habsbourg en ces termes: "Charles d’Autriche voulut toujours être au service de la volonté de Dieu. La foi était le critère de sa responsabilité de souverain et de père de famille."

Puis, Jean-Paul II énuméra les quatre aspects principaux de la vertu du prince: recherche en toute chose de la volonté de Dieu, ce qui est la marque de tous les amis de Dieu; recherche de la paix; aide aux nécessiteux, sous la forme notamment du développement de l’assistance sociale; et conception de sa charge politique comme un service.

Pour conclure, voici une petite anecdote:

Lorsque la guerre de 1914-1918 éclata, l’archiduc Charles, avec son grade de général, se distingua sur le front de l’Est. Il parcourait les tranchées pour être près de tous ceux qui souffraient. C’est ainsi qu’un jour il rencontra un officier polonais, un certain Wojtyla avec qui il eut un bref contact. Ce Wojtyla, qui vénèra l'archiduc Charles, donna son nom de Charles à son deuxième fils, lequel était Karol Wojtila, le futur pape Jean-Paul II.

Paulette Leblanc

 

 

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