Miracle
eucharistique de Bordeaux
1822
Nous
sommes à Bordeaux, le 3 février 1822, vingt mois après la
fondation, très difficile, par le Père Pierre-Bienvenu
Noaille, de la Communauté religieuse de la Sainte Famille,
de Notre-Dame de Lorette. Retenu par son ministère
paroissial, le soir du 3 février 1822, dimanche de la
septuagésime, il demanda à l'abbé Delort, un prêtre docteur
en théologie et doyen de la Faculté de théologie de
Bordeaux, qui était un habitué de l'église des religieuses
de l'église Sainte Eulalie, rue Mazarin, à Bordeaux, de
célébrer pour lui, l'exposition et la bénédiction du
Saint-Sacrement. Les événements rapportés dans la présente
synthèse ont tous été racontés par le Père Delort lui-même,
dans le témoignage qu'il dut rédiger le 5 février 1822. En
effet, avec la prudence normale des responsables de
l'Église, l'évêque du lieu, Monseigneur d'Aviau, archevêque
de Bordeaux, entreprit une minutieuse enquête concernant les
événements qui se produisirent le dimanche 3 février 1822,
vers 16 heures. Pendant vingt minutes, les participants
purent contempler, se substituant à l’hostie exposée pour
l’adoration, le buste d’un homme jeune, au visage lumineux,
très beau, s’inclinant avec bonté vers l’assemblée
recueillie et paisible.

L'ostensoir du miracle
Image provenant du site des Sœurs de la
Sainte Famille
de Bordeaux
Le
Père Delort venait d'arriver dans l'église Sainte Eulalie.
Il exposa d'abord le Saint-Sacrement puis commença à
l'encenser. Bientôt, levant les yeux sur l'ostensoir, il ne
vit plus la Sainte Hostie qu'il avait lui-même placée; mais,
à sa place, au milieu du cercle de verre, il y avait un
portrait de Jésus, lumineux et très beau, et son buste, qui
paraissait vivant s’inclinait avec bonté vers l’assemblée.
Voici ce que le Père Delort écrivit dans son témoignage:
“La
figure était très blanche et représentait un jeune homme
d'environ trente ans, extraordinairement beau. Il était
revêtu d'une écharpe de couleur rouge foncé. Il s'inclinait
de temps en temps à droite et devant. Frappé par ce prodige,
et ne pouvant en croire mes yeux, je crus d'abord que ce
n'était qu'une illusion, mais le miracle continuant, et ne
pouvant plus rester dans cette incertitude, je fis signe à
l'enfant qui tenait l'encensoir de s'approcher de moi. Je
lui demandai s'il n'apercevait rien d'extraordinaire. Il me
répondit qu'il avait déjà aperçu le même prodige et qu'il
l'apercevait encore. Je l'engageai alors à faire prévenir la
Supérieure. Il en parla à la sacristine qui, frappée
elle-même de ce spectacle et absorbée par les sentiments
qu'il lui inspirait, ne put s'acquitter de la commission qui
lui était donnée.
Pour moi, anéanti et prosterné contre terre, je ne levais
les yeux que pour m'anéantir davantage en la présence du
Seigneur. Je versais des larmes de joie, de reconnaissance
et de confusion. Le prodige subsista durant tout l'hymne du
Saint-Sacrement, le Domine salvum fac, le cantique, les
oraisons. Et lorsque le cantique fut fini, montant à
l'autel, je ne sais comment, je pris l'ostensoir dans mes
mains, et donnai la bénédiction, contemplant toujours notre
divin Sauveur, que je tenais visiblement entre mes mains.
Ayant donné aux Dames de Lorette cette bénédiction, qui sera
sans doute bien efficace pour leur établissement, je posai
l'ostensoir sur l'autel; mais lorsque je l'ouvris, je ne vis
plus que les saintes Espèces dont Notre-Seigneur venait de
S'envelopper dès que la bénédiction eut été donnée. Tout
tremblant et versant encore des larmes, je sortis de la
chapelle, étonné du calme qui s'y était observé durant un
prodige si long…
À
peine fus-je hors de la chapelle, que toutes les personnes
de la maison m'environnèrent, me demandant si j'avais vu
moi-même le prodige qui les avait frappées, et me faisant
plusieurs questions à ce sujet. Je ne pus leur dire que ces
mots:
– Vous avez vu Notre-Seigneur, c'est une faveur insigne
qu'Il vous a accordée, afin de vous rappeler qu'Il est
réellement avec vous, de vous porter à L'aimer davantage et
à pratiquer toutes les vertus qui vous ont attiré une si
grande grâce.
Je
me retirai chez moi, et durant toute la nuit, je ne pus que
songer au prodige dont je venais d'être témoin. Le lendemain
lundi, étant allé à la paroisse Sainte-Eulalie et y ayant
trouvé Mr. l'abbé Noailles, je lui fis part, ainsi qu'à
quelques autres personnes, de ce miracle, quoique j'eusse
résolu de n'en parler à qui que ce fût. Mais l'enfant qui
encensait, et quelques personnes étrangères qui se
trouvaient dans la chapelle de Lorette, ayant rendu compte
de ce qu'ils y avaient vu ainsi que moi, j'ai pensé que le
Seigneur voulait que j'appuyasse leur témoignage...
…
Je déclare ce que j'ai vu, ce que j'ai, pour ainsi dire,
touché de mes propres mains, et quoique mon témoignage soit
de peu de poids, je me regarderais comme le plus ingrat et
le plus coupable des hommes, si je le refusais pour attester
la vérité."
Signé
à Bordeaux par le Père Delort, le 5 février 1822”.
Nous
comprenons que le Miracle Eucharistique de Bordeaux qui
advint 20 mois après la fondation, en 1820, par le Père
Pierre Noaille, de la Communauté des Sœurs de la Sainte
Famille, dans leur église Sainte Eulalie, est étroitement
lié à cette Communauté. Outre les religieuses, les nombreux
fidèles qui étaient présents dans l'église au moment du
prodige, purent contempler, pendant plus de vingt minutes,
Jésus qui les bénissait. Quelques personnes témoignèrent
avoir entendu dire par Jésus "Je suis celui qui est".
Cet événement fut approuvé par les autorités
ecclésiastiques, notamment par l’Archevêque de Bordeaux,
Monseigneur d’Aviau, après qu’il eut entendu les témoignages
des fidèles qui avaient assisté au Prodige. Aujourd’hui
encore on peut visiter la chapelle du Miracle et vénérer la
précieuse Relique de l’ostensoir des apparitions, ostensoir
conservé à Martillac, auprès de la communauté contemplative,
"La Solitude".
Je
dois ajouter que l'Archevêque de Bordeaux, Monseigneur d'Aviau
du Bois de Sanzay, fut très touché par le récit du Père
Lefort. Il invita toutes les religieuses à témoigner de ces
faits, et à témoigner leur reconnaissance au Seigneur.
Cependant, par prudence, il exigea d'abord une extrême
discrétion sur cette affaire. Il ordonna au vicaire général
Barrès de procéder à l’enquête dont les résultats
l'obligèrent à ajouter foi au prodige. En conséquence, tout
à fait convaincu de l'authenticité des faits, et pour en
perpétrer la mémoire, il demanda que l'exposition du
Saint-Sacrement et un salut solennel aient lieu chez les
Sœurs de la Sainte Famille le jour anniversaire du prodige
accordé par Notre Seigneur aux premiers membres de leur
Congrégation.
L'ostensoir du miracle existe encore et a été transporté,
comme une relique, au couvent des Sœurs Agricoles à
Martillac. Aujourd’hui, la Famille de Pierre Noailles est
une famille spirituelle et apostolique comprenant des
Religieuses contemplatives et apostoliques, des Séculières
consacrées, des Prêtres et des Laïcs associés. La
Sainte-Famille de Bordeaux est présente en Afrique, en
Amérique, en Asie et en Europe.
Voici
maintenant quelques témoignages donnés par les personnes qui
virent le miracle:
Milady
Peychaud,
en religion Sœur Marie de Jésus, ne vit rien, mais entendit
Quelqu’un lui dire: “Je suis Celui qui suis, il n’y a que
Moi qui sois…" La voix continua pendant toute la durée
de la bénédiction disant: "Les honneurs et l’estime des
hommes ne sont que de la fumée, et Je suis Celui qui suis;
leur amitié n’est que de la poussière, et Je suis Celui qui
suis. Les richesses et les plaisirs ne sont que de la boue,
et Je suis Celui qui suis, et il n’y a que Moi qui sois.”
Mère
Trinité Noailles déclara:
“J’ai vu… des lumières éclatantes de chaque côté, et à
peine les ai-je aperçues qu’elles tombèrent en gerbes et se
dissipèrent; préoccupée de cette vision pendant l’hymne du
Saint Sacrement, les oraisons et le cantique, et sentant au
dedans de moi une grande ferveur, je me disais: Oh! que je
serais contente si c’était réellement mon Dieu qui voulût se
montrer à découvert! Que je serais heureuse de le voir!…
Mais comme j’avais souvent formulé ce désir, je craignais
que ce ne fût une illusion, et cependant je voyais toujours
Notre-Seigneur sous la même forme…”
Et
voici le témoignage de l’enfant de chœur Jean DEGRETEAU:
“Ayant coutume d’aller à Lorette, le dimanche, pour
servir le prêtre qui donne la Bénédiction, j’y suis allé le
dimanche de la Septuagésime; lorsque le prêtre eut mis le
Saint Sacrement sur l’autel, je vis que l’ostensoir était
tout brillant là où l’on met l’hostie: l’hostie n’y était
plus, maïs à la place je vis un buste et une tête qui
s’approchait de la vitre.
J’étais bien surpris; quand M. Delort me demanda si je
voyais, je lui dis que oui. Je vis bien que c’était un
miracle et j’étais tout tremblant. Ça dura toute la
bénédiction; quand M. Delort sortit de la chapelle, tout le
monde vint lui demander ce que c’était, et il dit que
c’était Notre-Seigneur. Je lui ai demandé s’il ne tremblait
pas, il me dit que ça lui donnait de la force. J’ai dit tout
à maman et à M. Renaud le soir même; j’étais tout
tremblant.”
Fortifiée par la manifestation visible de la présence divine
dans l’Eucharistie, et la paix succédant aux angoisses des
débuts, la Congrégation de la Sainte-Famille se développa
rapidement. Attentive aux appels du Seigneur, elle essaya de
faire face aux innombrables nécessités de l’après-Révolution
française. Aujourd’hui, la Famille de Pierre-Bienvenu
Noailles est une famille spirituelle et apostolique: la
vocation baptismale de ses membres s’épanouit et s’exprime
dans des formes diverses. Elle comprend: des Religieuses
contemplatives et apostoliques, des Séculières consacrées,
des Prêtres et des Laïcs associés. La Sainte-Famille de
Bordeaux est présente en Afrique, en Amérique, en Asie et en
Europe.
Paulette Leblanc |