PREMIÈRE PARTIE

Méditations sur la Passion de Jésus
pendant sa vie privée

17
Le serpent d’airain

Le combat de Jésus

 

En Toi, Jésus, il y a un mystère qu’il nous est très difficile d’appréhender: c’est ta double nature, ta nature divine associée, mais comment? à ta nature humaine. Dieu nous as tous créés à son image; donc, si nous réfléchissons à ce qui se passe en nous quand   Tu permets que nous soyons tentés, peut-être comprendrons-nous un peu la Vie qui est en Toi.

Considérons-nous affrontés à une tentation: nous avons bien envie de faire telle chose qui n’est pas mauvaise en soi, mais qui n’est pas pour nous, pour des raisons de santé, parce que nous voulons offrir un sacrifice au Seigneur, ou pour d’autres raisons. Pendant un temps plus ou moins long nous ne cessons de nous battre, dans notre conscience, en faisant valoir les multiples arguments qui nous incitent, tous, à satisfaire notre envie. C’est souvent un combat épuisant jusqu’au moment où nous prenons enfin la bonne décision: nous ne succomberons pas à cette tentation. Alors, c’est la paix qui revient. Ce combat de tous les hommes contre les tentations, ne serait-il pas celui que Jésus a vécu, Lui aussi, pendant toute sa vie, mais à un niveau supérieur et avec une intensité souvent dramatique?

Suivons Jésus. Fermons les yeux et essayons de vivre près de Lui. C’est un jour de sabbat, proche de la Pâque, et ce matin, à la synagogue, le Rabbin a lu un texte de l’Exode. Le Peuple hébreu se révolte: il n’a rien à boire dans ce désert... il n’a rien à manger... il en a assez de cette vie misérable!... Au moins, en Égypte, ils avaient de quoi se rassasier!

Le peuple ne cesse de récriminer contre Dieu, ce Dieu qu’il ne voit pas, qui ne se manifeste que par ses actions. Certes, les actions de Dieu sont parfois grandioses, mais elles sont rares. Et puis, il serait bien commode d’avoir des dieux comme en ont les autres peuples: on pourrait les voir, les toucher. Oui, c’est sûr, elles ne parlent pas, mais elles sont à portée de main, tout près des hommes. Et Yahvé notre Dieu est si loin... Et  nous, nous ne pouvons plus supporter ce désert, cette vie errante...

Dieu a donné de l’eau à son Peuple assoiffé. Dieu a donné de la viande pour accompagner le pain de manne. Et le Peuple ne comprend toujours pas. Alors, Dieu se fâche, et envoie des serpents au venin mortel. Le Peuple enfin se retourne vers Dieu et implore sa miséricorde. Dieu n’attendait que cela, la conversion de ses enfants. Il demande à Moïse de fabriquer un serpent d’airain qui sera élevé, sur un haut monticule, pour que tout le monde puisse le voir: ceux qui seront mordus par un serpent n’auront qu’à regarder le serpent de bronze, et ils ne mourront pas.

La parabole est jolie. On ne sait d’ailleurs pas très bien si cet épisode est historique ou pas, cela n’a d’ailleurs aucune importance; ce qui compte, c’est ce que Dieu veut nous enseigner: dans toutes nos misères ou nos difficultés, tournons-nous vers Dieu et nous serons sauvés.

Contemplons de nouveau Jésus. Vivons avec Lui pendant quelques instants. Suivons-Le. Jésus, Tu viens d’entendre la lecture du texte sacré, Tu fermes les yeux un moment, puis, l’office étant terminé, Tu sors de la synagogue, mais Tu T’éloignes de la foule bruyante. Tu vas dans un champ proche, situé à une distance inférieure à celle permise le jour du Sabbat et Tu achèves ta méditation...

Jésus, Tu es assis sur un tas de pierres et Tu regardes le Mont Tabor que Tu peux contempler d’où Tu es. Tu imagines le serpent d’airain élevé de terre: tous ceux qui regardaient le serpent d’airain étaient guéris de sa morsure. Jésus, Tu es homme et Dieu, et Tu sais qu’il y a ici, bien plus que Moïse, bien plus que le serpent... Tu sais que Tu dois être élevé de terre pour sauver tous les hommes, les pauvres hommes mordus et empoisonnés par le péché, et les attirer tous à Toi. Tu sais...

Tu sais, Jésus mais il se passe en Toi un étrange combat, un dramatique dialogue entre le Père et Toi. Jésus, une vision terrible se forme en Toi. Tu contemples soudain, sur une autre montagne, le sommet du Calvaire, Tu contemples un autre serpent d’airain, une autre figure, le signe du salut pour l’humanité entière. Tu contemples une croix sur laquelle meurt un homme atrocement torturé, et cet homme, c’est Toi. Et ta nature humaine, secouée de douloureux frémissements, se révolte et dit non. Non Père! Non Père!...

Ta nature humaine, Jésus, crie non! de toute sa puissance, mais en Toi, en même temps, une autre voix s’élève:

– Ô mon Fils Bien-Aimé, mon Unique, Tu sais bien que c’est notre volonté, notre volonté divine. Souviens-Toi comment le Verbe, mon Verbe, me proposa la Croix pour guérir tous nos enfants. Souviens-Toi, mon Fils, Toi, mon Verbe et Fils Unique qui deviendrait le Christ, souviens-Toi comment Tu proposas pour Toi, le Chemin de la Croix pour sauver tous les hommes. Ta proposition devint Notre volonté trinitaire, devint ta volonté...

– Oui, Père, j’accepte ta volonté divine, mais aujourd’hui ma nature humaine se révolte. Donne-Moi, Père, la force de continuer le chemin décidé pour devenir le Nouveau Serpent d’airain, la Croix bienheureuse vers qui se tourneront, pendant les siècles des siècles, les regards angoissés des hommes qui cherchent la paix, des hommes qui Nous cherchent.

Cet étrange combat dans le Cœur de Jésus dura longtemps. Très longtemps. Jésus-homme se débattait, Jésus-Dieu s’apaisait. Des larmes ruisselaient sur les joues de Jésus... Mais l’Amour fut le plus fort. Jésus se releva, et rempli de la force du Père et de son Esprit, retourna vers les hommes.

pour toute suggestion ou demande d'informations