LE BIEN ET LE MAL

Comment peut-on rendre le mal pour le bien? Cette phrase de Jérémie, (Ch. 18) nous fait penser à Jésus marchant vers Jérusalem pour y être condamné, puis crucifié. Jésus vient de redire cela à ses disciples, et c'est à ce moment que Madame Zébédée vient implorer Jésus pour que ses enfants soient "l'un à sa droite et l'autre à sa gauche, dans son royaume." Vraiment ces deux disciples n'avaient rien compris aux enseignements de leur Maître. Évidemment ils ne pouvaient pas savoir que bientôt, ce seraient deux larrons qui seraient crucifiés avec Jésus, l'un à sa droite, et l'autre à sa gauche, car s'ils avaient su... Profitant de cet événement et de la colère des autres disciples, Jésus enseigna que "devenir grand, c'est devenir serviteur, comme Lui est venu pour servir et non pas pour être servi." 

Étrange le parallèle entre Jésus et Jérémie! Jérémie sera tellement malmené qu'il se plaindra à Dieu. Mais Dieu l'obligera à poursuivre sa vocation de prophète. Jésus monte vers Jérusalem. Il sait ce qui l'attend; pourtant Il continue sa marche jusqu'à Gethsémani où, n'en pouvant plus, Il appellera le Père pour que "son Calice s'éloigne de Lui." Plus tard, tout au long de la Nouvelle alliance, les saints torturés appelleront Dieu. Mais Dieu se taira souvent, car "Il a besoin des souffrances de ses saints." Mystère étonnant pour les pauvres humains. Et nous sommes bien d'accord avec la réponse de sainte Thérèse d'Avila à Dieu, lorsqu'Il lui déclara que "c'était ainsi qu'Il traitait ses amis", et que cette dernière s'écria: "Je comprends pourquoi Vous en avez si peu!" 

Cette réaction est parfaitement humaine et pleine de bons sens. Mais il y a une raison à la façon de faire de Dieu: nous savons que c'est l'unité de la création qui souffre quand un péché, même un seul, se commet. Pour panser les plaies du Corps mystique auquel nous appartenons tous, il faut qu'un ou plusieurs saints souffrent pour qu'un pécheur guérisse. Je vais m'expliquer. 

Notre humanité a été blessée en profondeur par le péché. Or nous sommes tous plus ou moins pécheurs. De par la communion des saints, le Corps mystique est tout entier blessé et plein de plaies à cause des péchés des hommes. Dieu veut se servir des prophètes, des saints et par-dessus tout de Jésus, pour panser ces plaies, et tenter de les guérir. Or quand on soigne une plaie, nous savons tous que cela fait mal tout autour, voire plus loin parfois. Il en est de même dans la vie spirituelle. Si des saints acceptent d'être meurtris, c'est pour le bien de tous les hommes. Et les saints que Dieu s'est choisis ont mal. Mais, comme ils ont bien compris le fait qu'on a toujours mal autour d'une plaie que l'on veut soigner, ils s'offrent d'eux-mêmes à Dieu. Cependant, Dieu connaissant la faiblesse des hommes, les souffrances des saints sont limitées; seules les souffrances du Christ ont pu "saisir" tout son Corps. 

Réfléchissons: contemplons notre monde de péchés, spécialement là où il a le plus souffert depuis près de 100 ans: les goulags communistes, les camps de concentration nazis, jusqu'aux persécutions actuelles dans les monde musulmans, voire hindouistes. Ce sont les chrétiens torturés qui "soignent" les péchés de leurs tortionnaires participant ainsi à la guérison du corps. Mais cela est encore insuffisant compte tenu des dizaines de millions d'hommes morts dans les camps, contre la volonté de Dieu qui a dit: "Tu ne tueras pas!" Alors des saints arrivent. Les uns peuvent souffrir beaucoup tout en étant cachés dans un monastère; mais il sont souvent très efficaces après leur mort. D'autres seront appelés à réaliser les grandes œuvres indispensables pour réparer, sur la terre, les dégâts des pécheurs.  

Ici, très curieusement, nous remarquons que souvent, les saints appelés à réaliser de grandes œuvres, avant ou après leur mort, ont été choisis par paires, mais des paires déconcertantes, inhabituelles. Ainsi on peut citer, parmi les saints cachés: Élisabeth de la

Trinité, à Dijon et Dina Bélanger au Québec; ou encore Thérèse de Lisieux et Gemma Galgani en Italie; ou Alexandrina de Balasar au Portugal et Marthe Robin en France. Parmi les saints actifs, on pense forcément à saint Jean Baptiste de la Salle et à don Bosco, ou à saint Jean de Dieu et saint Vincent de Paul, ou encore à Alain de Solminhiac et François de Sales. Autre remarque: le souci de tous ces saints, même les plus cachés de leur vivant, fut d'éduquer ou de laisser des documents permettant d'enseigner les populations venant après eux. 

Et aujourd'hui? Le nombre de plaies à soigner est incalculable, et déjà des saints se mettent à la tâche. Mais ils sont tous persécutés: pourquoi? Pourquoi ceux qui font le bien sont-ils persécutés? Les nouveaux saints, ceux qui commencent à se lever en ce moment sont pleins de charité? Ils acceptent de soigner des plaies hideuses malgré toutes leurs répugnances et nombreuses sont les attaques de toutes sortes qu'on leur fait subir. Mais pourquoi? C'est qu'ils sont étroitement unis à Jésus, d'où leur participation aux souffrances du Christ qui soigne le corps tout entier. On revient à l'unité de la Création qui souffre quand un seul péché est commis, et qui guérit lorsqu'un saint la soigne, uni étroitement au Christ et aux souffrances de sa Passion. Car Dieu veut que les hommes participent à la réparation et à la guérison du Corps tout entier. 

Tout ce qui précède est un constat. Parfois, ce sont des questions. Car le mal est trop envahissant, et nous devons faire quelque chose, rapidement. L'Évangile du Bon Samaritain se termine par une phrase étonnante du Père à son Fils aîné qui n'arrivait pas à comprendre l'attitude de son Père: " Ne fallait-il pas se réjouir… car ton frère était mort et il est vivant…" Oui, la mort des hommes, c'est le péché. Mais quand le pécheur repentant se convertit et revient à Dieu, Dieu le Père l'accueille, pardonne sa faute, et se réjouit. Le Père se réjouit, et il va rendre à son fils sa dignité: il demande qu'on lui donne des vêtements convenables, et l'invite à un festin. Il est très probable qu'ensuite le Père rencontrera fréquemment ses deux fils pour les protéger et leur éviter de retomber dans le désordre pour l'un, dans ses erreurs, pour l'autre. Il montrera à son fils cadet toutes les fautes qu'il avait commises et qui l'avaient fait tomber si bas, et dans le malheur. Il montrera à son aîné la richesse de la charité qui va jusqu'au pardon. Qu'est-ce que cela, sinon enseigner?  

Notre Église, aujourd'hui, demande à tous les hommes une grande charité; elle a raison, mais est-ce que nous ne nous trompons pas de charité? On donne beaucoup matériellement et cela est normal, car avant de prêcher, il faut d'abord donner à manger à celui qui a faim, sinon il n'écouterait rien. Malheureusement, cela est devenu de l'assistanat; nous donnons des biens matériels, mais nous oublions ce qui rendrait aux pauvres leur dignité: connaître Dieu et apprendre un métier pour trouver du travail. En un mot, on oublie l'éducation et l'enseignement. Contemplons Jésus. Il acceptait souvent les invitations des pharisiens et de pécheurs. Il mangeait avec eux, mais il en profitait pour enseigner, et même pour dire des vérités qui ne plaisaient à tout le monde, surtout aux pharisiens et aux docteurs de la Loi… 

Nous devons nous réjouir quand un pécheur revient à Dieu. Nous devons nous réjouir quand quelqu'un qui ne connaît pas Dieu Le découvre. Mais nous devons, nous les chrétiens, les assister dans leur nouvelle vie, les faire grandir, leur faire connaître Dieu, son amour, donc sa Loi d'amour. En un mot, nous devons les évangéliser: c'est leur avenir qui est en jeu. Jamais nous ne devons oublier que l'on ne peut pas choisir ce que l'on ne connaît pas. Dieu veut que tous ses amis connaissent sa Loi d'amour. La Bible nous le prouve. Donc, nous devons enseigner, éduquer, et même parfois sévir pour remettre des âmes dans le bon chemin. Notre raisonnement vient de notre foi, car, en ce qui nous concerne, nous cherchons surtout le salut des âmes, le salut éternel de nos frères. On ne choisit Dieu que si on le connaît! 

Qu'est-ce que c'est que "connaître Dieu" sur la terre? Connaître Dieu c'est découvrir qu'Il nous a créés et qu'Il nous aime. Il veut notre bonheur car ceux qui aiment veulent toujours le bonheur de l'être aimé. Dieu est bonté, Miséricorde, mais Il veut aussi que nous fassions sa Volonté pour prouver que nous, nous L'aimons aussi. C'est d'une logique implacable: pourquoi l'oublie-t-on? Éduquer, c'est respecter; laisser dans l'ignorance, c'est mépriser. C'est aussi renier Jésus qui a toujours enseigné jusqu'à son départ: "Allez! Enseignez toutes les nations…" Cela nous ne le faisons plus. Pourquoi? Pourtant, notre constat est implacable: nous revenons toujours à la Loi de Dieu qui est le bonheur des hommes, et à son amour. 

Résumons: 

- Si on aime, on veut que ceux que l'on aime soient heureux.

- Mais on n'aime que ce que l'on connaît. 

Donc nous devons faire connaître la Loi de Dieu à ceux que nous aimons pour qu'ils soient heureux. On revient toujours à l'éducation. Sinon, c'est l'égoïsme qui règne, et c'est le malheur via les péchés capitaux et les vices. Les paroles de Jésus sont très claires, sans aucune ambiguïté. Pourquoi les a-t-on obscurcies? Pourquoi n'osons-nous pas les répéter, les paroles de Jésus? Pourquoi continuons-nous à nous taire? Et pourquoi continuons-nous à édulcorer la Parole de Dieu? Pourquoi n'osons-nous plus dire la vérité ou l'interprétons-nous? Les hommes d'aujourd'hui refusent la colère de Dieu; mais la colère de Dieu ne consiste pas à tout casser: Dieu ne veut pas détruire son œuvre. La colère de Dieu c'est de nous laisser à nous-mêmes et aux conséquences du mal que nous commettons, afin de nous laisser expérimenter une vérité essentielle: nous ne pouvons rien faire de durable sans Dieu. Certes, matériellement nous faisons plein de choses, mais tout mourra, tout disparaîtra. Alors, à quoi bon? 

Aujourd'hui, il semble que quelques chrétiens se réveillent grâce à ceux qui ont su conserver la Loi de Dieu et l'enseigner. Mais nous devons nous hâter: pour évangéliser de nouveau et pour porter un témoignage fort, car seuls les hommes qui aiment Dieu et font sa volonté, c'est-à-dire observent sa Loi, sont heureux. 

Paulette Leblanc 10 mars 2013

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