Premier jour
Le Sauveur invite le fidèle à lui consacrer ce mois
Voix de Jésus
: « Écoute, ô mon fils; laisse-Moi te parler au cœur. Je
t'aime, Je t'aime infiniment plus que tu ne
pourras
jamais le comprendre, et Je veux te parler pour te rendre
heureux. Je suis venu au monde, et le monde ne M'a point
connu; Je suis venu au milieu des miens, et les miens n'ont
pas voulu Me recevoir; encore aujourd'hui, Je réside parmi
les hommes dans le Sacrement où l'Amour m'a fait leur
captif, il y a plus de dix-huit siècles, et les hommes Me
méconnaissent et M'oublient Les ingrats ! ils pensent à
tout: à leurs parents, à leurs amis, à leurs bienfaiteurs, à
leurs moindres affaires de ce lieu de passage, à leurs viles
passions; et ils ne pensent point à Moi, leur Dieu, leur
Créateur, leur Sauveur, à Moi qui Me suis rendu victime du
plus grand Amour possible. Ils Me délaissent comme un
étranger isolé au milieu d'un peuple auquel il est inconnu;
ils ne Me visitent point; ils Me regrettent presque le peu
d'instants que la coutume ou le respect humain leur fait
passer dans Mes Temples. Que dis-je ? ils M'offensent; ils
ne pèsent nullement les suites de leurs outrages; ils
dédaignent le ciel que Je leur offre, ils bravent l'enfer
dont Je les menace; ils chassent, comme un souvenir
importun, la pensée du grand Sacrifice que J'ai fait pour
les sauver; ils détournent les yeux de l'image sainte de la
Croix qui leur représente l'héroïsme sanglant de Mon Amour;
et ils abandonnent ainsi Mon Cœur Sacré aux seuls hommages
des Anges qui l'environnent, et du petit nombre d'amis
fidèles qui se plaisent à l'adorer, à le louer et à l'aimer.
O mon fils, mets-toi de ce petit nombre, qui M'est si
agréable et si cher. Que Je sois pour toi ce que sont à ces
cœurs mondains si aveugles, si insensibles, les misérables
intérêts de cette courte vie; et tu Me seras un
dédommagement précieux de la perte de tant d'insensés qui
préfèrent les eaux bourbeuses de l'iniquité, à ce fleuve
d'eau vive dont Je suis la Source, les grossières voluptés
du monde aux chastes délices de Mon Amour. Consacre à Mon
Divin Cœur trente-trois jours d'hommages en reconnaissance
des trente-trois années que j'ai passées pour toi sur la
terre; en réparation de l'oubli et des outrages que Mes
autres enfants Me prodiguent chaque jour, à chaque instant
du jour; en témoignage de ton dévouement sincère et
perpétuel au Cœur de Celui qui t'a tant aimé, qui t'aime
encore si tendrement et qui désire pouvoir t'aimer pendant
l'éternité. Pour ton Dieu, pour ton Jésus, dis-moi, mon
fils, est-ce trop ?... »
Réflexion
Hélas ! en accordant à Jésus ce qu'Il me demande,
qu'aurai-je fait encore qui puisse entrer en comparaison
avec ce que je Lui dois ? Et comment pourrais-je ne pas
mettre mon bonheur à répondre, avec le plus vif
empressement, à une si douce et si tendre invitation de Son
Cœur adorable ? J'ai tant à réparer envers Lui ; et je suis
si faible, si languissant, si dénué de mérites et de
vertus !... Ah ! béni soit-il de ce qu'Il daigne m'offrir de
quoi suppléer à tout ce qui me manque. Oui, voici de quoi
payer mes dettes, de quoi me guérir de mes maux, de quoi me
fortifier, de quoi m'enrichir pour le Ciel. Jésus ne se
laisse pas vaincre en générosité: si en ce Mois je donne
tout sans réserve à Son Divin Cœur, je recevrai en échange
une effusion surabondante de grâces et le don Ineffable de
Son Amour, qui est cette perle précieuse, ce trésor caché
dont Il nous parle dans Son Évangile, cet unique nécessaire,
sans lequel tout le reste n'est rien, avec lequel on possède
tout ce que les plus vastes désirs peuvent embrasser.
Pratique
Pendant tout ce Mois faites, chaque jour, une visite au
Sacré Cœur, dans l'intention d'honorer Son Amour envers les
hommes, et de Lui faire réparation pour leurs ingratitudes.
2° Imposez-vous aussi chaque jour, à la même fin, une légère
privation quelconque: le Cœur de Jésus pèse l'amour et la
volonté qui produisent l'œuvre plutôt que l'œuvre elle-même.
Pieux sentiments d'une âme toute dévouée à Jésus
Mademoiselle Victorine de Galard-Terraube, morte en 1836,
après une trop courte vie consacrée à compatir à toutes les
douleurs, à répandre un baume salutaire sur toutes les
afflictions, à soulager de son mieux toutes les infortunes,
se sentait pénétrée de la plus vive douleur au sujet de
l'oubli et de l'ingratitude des hommes envers le Cœur de
Jésus: faveur spéciale que les âmes ordinaires ne conçoivent
même pas, et qui n'est guère accordée qu'à celles qui sont
embrasées de l'amour divin. « À chaque nouvelle profanation,
écrivait-elle, la pensée qui s'empare toujours de moi, c'est
que tout le monde, dans ces temps malheureux, trouve des
cœurs sensibles, et que mon Jésus n'en trouve pas: tout le
monde est plaint, et mon Jésus ne l'est par personne. C'est
alors que je sens toujours, je l'avoue, mon bien faible
amour se ranimer, que je m'offre à ce bon Sauveur sans
réserve, et que je le conjure de vouloir bien faire son
séjour dans mon cœur, en en chassant tout ce qui pourrait le
contrister ». L'ingratitude des hommes envers un Dieu qui
les a tant aimés, l'aveuglement des pécheurs, l'indifférence
des justes eux-mêmes a la vue des crimes qui inondent la
terre : telles étaient les causes ordinaires des larmes que
Victorine répandait en la présence du Seigneur. L'état de la
France, sous le rapport religieux, l'occupait d'une manière
tonte particulière. Elle voyait, avec une douleur profonde,
la foi bannie de tant de cœurs, la religion de nos pères
devenue comme étrangère au plus grand nombre, ses préceptes
publiquement violés, ses solennités profanées
audacieusement. Ce qui l'affligeait particulièrement,
c'était de voir que même parmi les âmes pieuses, dont les
vertus peuvent seules arrêter les coups terribles de la trop
juste colère du Seigneur, il en était si peu qui parussent
assez reconnaître l'amour de notre divin Jésus, et entrer
dans ces sentiments d'expiation, d'amende honorable et de
dévouement dont il lui semblait qu'elles auraient dû être
constamment animées. Ames justes, marchez, au moins de loin,
nous vous en conjurons, sur les traces de Victorine;
cherchez, comme elle, à aimer davantage votre Dieu, à
proportion qu'il est plus offensé. Ah! qu'il n'ait pas à
répéter, de nos jours, ces plaintes si touchantes qu'il
faisait entendre autrefois par la bouche du Roi-Prophète :
« J'ai attendu quelqu'un qui s'affligeât avec moi, et
personne ne s'est présenté; quelqu'un qui cherchât à me
consoler, et je ne l'ai pas trouvé ». (Vie de Mademoiselle
de Galard-Terraube, 5e partie.) |