Saint Jean de Matha,
originaire d'une illustre famille, en Provence, fut consacré au Seigneur par un
vœu, dès sa naissance. Il brilla, tout jeune
encore,
par le divin instinct de la charité. On le voyait distribuer aux
pauvres
l'argent que ses parents lui donnaient pour ses menus plaisirs, et tous les
vendredis il allait servir les malades dans les hôpitaux; là, il pansait leurs
plaies et leur procurait tous les secours qui étaient en son pouvoir. C'est par
cette conduite admirable, il y a lieu de le croire, que le pieux jeune homme
mérita de devenir le père d'un grand Ordre de charité.
Le jour où il fut élevé au
sacerdoce une colonne de feu reposa sur la tête du nouveau prêtre et manifesta
l'onction du Saint-Esprit qui opérait dans son âme. Le bruit de ce prodige
s'étant répandu, une nombreuse assemblée assista à sa première Messe. Au moment
de la consécration, lorsque Jean élevait l'hostie, on vit le visage du saint
resplendir d'une lumière surnaturelle et ses yeux se fixer au dessus de l'autel
sur un spectacle invisible aux assistants. "J'ai vu, dit-il plus tard, un ange
tout blanc, avec un vêtement brillant, portant sur la poitrine une croix de
couleur rouge et bleue; ses bras se croisaient, et il présentait les mains à
deux captifs, l'un chrétien et l'autre maure ; ils étaient à ses pieds dans la
posture de suppliants."
C'était l'annonce claire de
l'œuvre qu'il devait établir; il fut, en effet, le fondateur de l'Ordre de la
Sainte-Trinité pour la rédemption des captifs, dont les religieux portèrent le
costume indiqué par la vision.
Qui dira tout ce que le Saint
eut à souffrir dans son pénible apostolat? "Si je n'ai pas le bonheur d'être
martyr, disait-il souvent, puissai-je au moins rester chez les barbares, comme
esclave, pour mes frères!"
Dieu seconda plus d'une fois
son zèle par des miracles. Un jour que les habitants de Tunis voulaient
l'empêcher de ramener en Europe les nombreux captifs qu'il avait rachetés, il se
prosterna et invoqua Marie; puis, à la grande stupéfaction des infidèles,
étendit son manteau en guise de voile sur le navire. Celui-ci, sans rames, sans
voiles, sans gouvernail, vogua bientôt en pleine mer et aborda en moins de deux
jours à Ostie, aux applaudissements d'une foule émerveillée du prodige.
Jean de Matha mourut à Rome,
usé de fatigues, dans la pauvreté et la pénitence, mais chargé d'œuvres et de
mérites. La pauvre petite cellule qu'il sanctifia par ses dernières années et
par sa mort a été conservée jusqu'à ce jour.
Abbé L. Jaud
Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950.
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