La
persécution de Dèce fit beaucoup de ravages en Egypte au
milieu du troisième siècle, et fournit à un grand nombre de
chrétiens l'occasion de remporter la couronne du martyre. De ce
nombre fut Ischyrion. Il demeurait chez un officier d'une ville
d'Egypte, auquel il était attaché en qualité d'agent ou d'homme
d'affaires. Son maître, ayant appris qu'il professait le
christianisme, lui ordonna de sacrifier aux idoles. Ischyrion ayant
refusé d'obéir, fut d'abord maltraité de paroles. Sa constance
inébranlable transporta de fureur l'officier qu'il servait. Enfin
celui-ci ne se possédant plus, saisit un pieu aiguisé qu'il
rencontra sous sa main, le lui enfonça dans le ventre, et lui creva
les entrailles. Saint Ischyrion est nommé en ce jour dans le
martyrologe romain.
Ce n'est que la
vertu qui peut rendre un homme véritablement grand et véritablement
heureux. Fût-on serviteur ou esclave, on peut parvenir à cette
grandeur, à ce bonheur, qui font disparaître la différence que le
monde met entre les hommes. On trouve même dans l'état de servitude
plus de facilité pour se sanctifier, et bien moins d'obstacles à la
pratique de la vertu. Il faut d'abord y être fidèle à Dieu, et
remplir avec zèle les devoirs que prescrit la piété chrétienne.
Qu'on ne dise pas qu'on manque de temps pour prier. Ce n'est point
le temps qui manque, c'est la ferveur. On prie quand on fait pour
Dieu ce qu'on est obligé
de faire par état. Servir un maître
avec fidélité, lui obéir, le respecter, l'aimer, ne sont-ce pas des
choses agréables à Dieu ? N'en dirons-nous pas autant de cet amour
de la justice, de la concorde, de la charité, et de cette
réciprocité de services à l'égard de ceux qui sont dans le même
état, et de ces autres vertus, de la pratique desquelles dépendent
la paix, le bon ordre, et la félicité des familles ? Combien
d'occasions de faire éclater la patience, la douceur, l'humilité, la
résignation à la volonté de Dieu, la confiance en sa sagesse et en
sa bonté ! Que ceux qui sont attachés au service des autres se
pénètrent de ces sentiments,
qu'ils en fassent la règle de leur conduite, ils se feront aimer de
Dieu et des hommes , ils deviendront véritablement utiles à la
société, ils seront la bénédiction des familles dans le sein
desquelles ils auront à vivre.
SOURCE :
Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux
Saints… – Traduction : Jean-François Godes-card. |