Chapitre quatrième

Ils eurent en poupe un vent si violent qu'ils firent le trajet de Barcelone à Gaète en cinq jours et cinq nuits, tous, il est vrai, ayant une crainte assez vive à cause de la forte tempête. Dans tout ce pays-là on redoutait la peste mais lui, à peine débarqué se mit en route pour Rome. Parmi les voyageurs qui avaient pris le bateau, une mère, accompagnée de sa fille qui portait des habits de garçon, et un jeune homme se joignirent à lui. Ils le suivaient parce que, eux aussi, ils mendiaient. Arrivés à une ferme, ils trouvèrent un grand feu de camp et beaucoup de soldats tout autour, lesquels leur dirent de manger et leur donnèrent beaucoup de vin, les invitant d'une manière telle qu'ils semblaient avoir l'intention de les enivrer. Ensuite ils les séparèrent mettant la mère et la fille en haut dans une chambre et le pèlerin avec le jeune homme dans une étable. Quand vint minuit, il entendit que l'on poussait là-haut de grands cris. Il se leva pour aller voir ce que c'était et il trouva la mère et la fille qui étaient descendues dans la cour tout en larmes et qui se plaignaient qu'on voulait les violenter. Il fut pris alors d'un élan si impétueux qu'il se mit à crier: «Est-ce qu'on peut tolérer cela?» et d'autres plaintes semblables. Il les proférait avec tant d'énergie que tous les gens de la maison restèrent effrayés et que personne ne lui fit aucun mal. Le jeune garçon s'était déjà enfui et tous trois se remirent en route en pleine nuit.

Arrivés à une ville qui était proche ils la trouvèrent fermée. Ne pouvant y pénétrer, ils passèrent tous les trois le reste de cette nuit dans une église du voisinage où la pluie entrait. Le matin, on ne voulut pas leur ouvrir la ville. Ils ne recueillirent aucune aumône au-dehors, bien qu'ils fussent allés jusqu'à un château qui leur paraissait proche, et là, le Pèlerin se trouva pris de faiblesse, aussi bien à cause des épreuves de la mer que du reste. Comme il ne pouvait plus cheminer, il resta sur place. La mère et la fille s'en furent en direction de Rome. Ce jour-là, beaucoup de gens sortirent de la ville. Sachant que la dame à qui appartenaient ces terres allait venir, il se posta au-devant d'elle et lui dit qu'il n'était malade que de faiblesse. Il lui demanda qu'on le laissât entrer pour chercher quelque remède à son état.

Elle accepta facilement. Il commença de mendier à travers la ville et reçut des liards (24) en abondance. Ayant mis deux jours à se refaire, il reprit son chemin et parvint à Rome le dimanche des Rameaux. Là, tous ceux qui lui parlaient, apprenant qu'il n'avait pas un sou pour aller à Jérusalem, entreprirent de le dissuader, lui affirmant, avec beaucoup de raisons à l'appui, qu'il était impossible d'obtenir le passage sans argent. Mais il avait une grande certitude en son âme et ne pouvait absolument douter qu'il ne trouvât moyen d'aller à Jérusalem. Ayant reçu la bénédiction du pape Adrien VI il partit pour Venise, huit ou neuf jours après ou sept ducats qu'on lui avait donnés pour la traversée de Venise à Jérusalem. Il les avait pris, quelque peu vaincu par les craintes qu'on lui avait mises au coeur de ne pouvoir obtenir autrement le passage. Mais deux jours après être sorti de Rome, il découvrit qu'il avait agi là par manque de confiance et il eut le très lourd regret d'avoir pris les ducats. Il se demandait s'il ne serait pas bon de s'en débarrasser. Mais à la fin il résolut de les dépenser largement en les donnant à ceux qui se présenteraient à lui, lesquels ordinairement étaient pauvres. Et il le fit de telle sorte qu'arrivé à Venise il ne lui restait plus que quelques liards, qui lui furent bien nécessaires cette nuit-là.

Pendant le trajet jusqu'à Venise il dormait sous les portiques à cause des précautions que l'on prenait contre l'épidémie. Une fois il lui arriva, comme il se levait au matin, de se trouver nez à nez avec un homme qui, en l'apercevant, se mit à fuir avec une grande épouvante, parce que sans doute il devait être bien livide.

En cheminant ainsi il parvint à Chioggia et il apprit, en même temps que quelques compagnons de route qui s'étaient joints à lui, qu'on ne les laisserait pas entrer à Venise. Ses compagnons décidèrent d'aller à Padoue pour y prendre un billet de santé et il partit avec eux. Mais il ne pouvait pas marcher à leur pas, tant ils cheminaient vite, et ils le laissèrent, presque à la nuit, au milieu d'une grande plaine. Et là, le Christ lui apparut de la manière qu'il avait accoutumé de lui apparaître, ainsi que nous l'avons dit plus haut, et il le réconforta beaucoup. Animé par ce réconfort, le jour suivant, au matin, sans contrefaire un billet d'entrée comme, je crois, ses compagnons firent ‹ il parvint à la porte de Padoue et entra. Les gardes ne lui demandèrent rien du tout. Il lui arriva la même chose à la sortie. Ses compagnons en furent profondément stupéfaits, eux qui venaient d'obtenir un billet de santé pour aller à Venise, billet dont il n'avait eu aucun souci.

Quand ils arrivèrent à Venise, les gardes vinrent à leur barque afin d'inspecter un à un tous ceux qui s'y trouvaient. Il fut le seul à être laissé tranquille.

Il subsistait à Venise par la mendicité et dormait sur la place Saint-Marc. Jamais il ne voulut aller à la résidence de l'ambassadeur de l'Empereur. Il ne montrait pas non plus de diligence spéciale pour trouver le moyen de faire la traversée. Il avait dans son âme la grande certitude que Dieu saurait lui permettre d'aller à Jérusalem et cela lui donnait une telle confiance que ni les raisonnements qu'on lui opposait ni les motifs de crainte qu'on lui suggérait ne pouvaient susciter en lui le doute.

Un jour un riche Espagnol l'accosta et lui demanda ce qu'il faisait et où il voulait aller. Ayant appris son intention, il l'emmena manger dans sa maison et ensuite il le garda quelques jours en attendant que fût préparé son départ. Le Pèlerin avait pris cette habitude, déjà depuis le temps de Manrèse, de ne pas parler à table quand il mangeait avec quelqu'un, sauf pour répondre brièvement, mais d'écouter ce qui lui fourniraient l'occasion de parler ensuite de Dieu, et, après le repas, c'est ce qu'il faisait. Telle fut la cause pour laquelle cet homme de bien et toute sa maisonnée s'attachèrent à lui au point de vouloir le garder et le forcèrent à rester chez eux. Ce même hôte le mena chez le Doge de Venise pour un entretien, c'est-à-dire lui fit accorder entrée et audience. Le Doge, ayant entendu le Pèlerin, ordonna qu'on lui permît d'embarquer sur le bateau des gouverneurs qui s'en allaient à Chypre (25).

Bien que cette année-là beaucoup de pèlerins fussent arrivés à Venise pour gagner Jérusalem, la plus part d'entre eux étaient repartis chez eux à cause de la nouvelle situation qui avait résulté de la prise de Rhodes. Cependant il y en avait treize dans le bateau de pèlerinage qui partit le premier et huit ou neuf restaient pour celui des gouverneurs, lequel était sur le point de s'en aller lorsque notre Pèlerin fut pris d'une grave maladie due à des fièvres. Après que ces fièvres l'eurent maltraité quelques jours elles le quittèrent.

Le jour où le bateau appareilla, il avait pris une purge. Ceux de la maison demandèrent au médecin s'il pouvait s'embarquer pour Jérusalem et le médecin répondit que, s'il s'agissait d'aller s'y faire enterrer, il le pouvait fort bien. Il s'embarqua cependant et partit ce jour-là. Il vomit tellement qu'il se trouva très soulagé et commença de se rétablir. Sur ce bateau se commettaient centaines horreurs et turpitudes, ouvertement, et il les reprenait avec sévérité. Les Espagnols qui faisaient la traversée lui conseillèrent de ne pas continuer, parce que l'équipage parlait de l'abandonner sur une île. Mais Notre Seigneur voulut qu'on arrivât bientôt à Chypre, où, laissant ce navire, les voyageurs gagnèrent, par voie de terre, un autre port qu'on appelle Les Salines, à dix lieues de là, et montèrent sur ce bateau, pour sa subsistance, rien de plus que l'espérance qu'il mettait en Dieu, ainsi qu'il avait fait sur l'autre bateau. Pendant tout ce temps Notre Seigneur  lui apparut à de nombreuses reprises, ce qui lui donnait beaucoup de consolation et de réconfort. Il lui semblait voir une chose ronde et grande, comme en or, c'est du moins ce qu'il se représentait. Après être partis de Chypre ils arrivèrent à Jaffa et comme ils cheminaient vers Jérusalem, montés sur leurs petits ânes, selon l'habitude, et n'étaient plus qu'à deux milles de la cité, un Espagnol, un noble à ce quil semblait, appelé Diego Manes, dit avec beaucoup de dévotion à tous les pèlerins qu'ils devaient, puisqu'ils allaient arriver bientôt à l'endroit d'où ils pourraient voir la Ville Sainte, se préparer tous, au fond de leur conscience et avancer en silence.
   Cela parut bon à tous et chacun se mit à se recueillir. Peu avant d'arriver à l'endroit d'où l'on voyait Jérusalem, ils descendirent de leurs ânes parce qu'ils avaient aperçu les moines, avec la croix, qui les attendaient. En découvrant la ville, le Pèlerin eut une grande consolation, laquelle, d'après ce que disaient les autres, fut générale, jointe à une allégresse qui paraissait différente d'une allégresse naturelle. Il éprouva toujours la même dévotion dans ses visites aux Lieux Saints.

Son plan bien arrêté était de demeurer à Jérusalem en visitant sans cesse les Lieux Saints. Il se proposait également, en plus de cette dévotion, d'aider les âmes. À cet effet il avait apporté des lettres de recommandation pour le père Gardien. Il les lui donna et lui dit son projet de rester sur place par dévotion ‹ mais non la seconde partie de ce projet, à savoir qu'il voulait être utile aux âmes, parce que cela il ne le disait à personne, tandis que la première partie il avait à plusieurs reprises divulguée. Le Gardien lui répondit qu'il ne voyait pas comment il lui serait possible de séjourner sur place étant donné que la Maison se trouvait dans une telle pénurie qu'elle ne pouvait même pas faire subsister les moines et qu'il avait résolu, en conséquence, d'en renvoyer quelques-uns, avec les pèlerins, en Europe.

Le Pèlerin répondit qu'il ne désirait obtenir de la Maison aucune chose sauf qu'on l'entende en confession quand il viendrait, de temps en temps, dans ce dessein.

Là-dessus le Gardien lui dit que, de cette façon-là, la chose pourrait se faire mais qu'il voulût bien cependant attendre la venue du Provincial (je crois qu'il était le supérieur de l'Ordre dans ce pays-là) lequel se trouvait à Bethléem.

Fort de cette promesse, le Pèlerin se rassura et il se mit à écrire des lettres pour Barcelone, à destination de certaines personnes spirituelles. Il en avait déjà écrit une et il était en train d'en écrire une autre, la veille du départ des pèlerins, quand on vint l'appeler de la part du Provincial, qui était arrivé, et du Gardien. Le Provincial lui dit, avec des paroles affables, comment il avait appris sa bonne intention de rester aux Lieux Saints et qu'il avait beaucoup réfléchi à cette chose mais que, fort de l'expérience qu'il avait faite avec d'autres, il jugeait que cela ne convenait pas. Beaucoup en effet avaient eu ce désir et tel d'entre eux avait été pris, tel autre était mort. Et puis l'Ordre était obligé de racheter ceux qui se faisaient prendre. C'est pourquoi il le priait de se préparer à partir le lendemain avec les pèlerins.

Il répondit à cela qu'il avait son plan bien arrêté et qu'il estimait ne pouvoir pour aucun motif renoncer à le mettre en ¦uvre. Il donna courtoisement à entendre que, même si le Provincial n'était pas de cet avis et sauf s'il y était obligé sous peine de péché, aucune crainte ne lui ferait abandonner son projet. À cela le Provincial répondit qu'ils détenaient du Siège apostolique l'autorité de faire quitter les lieux ou de maintenir sur place qui bon leur semblerait et d'excommunier quiconque ne voudrait pas leur obéir et qu'ils jugeaient, en l'occurrence, que le Pèlerin ne devait pas rester, etc.

Comme il voulait lui montrer les Bulles par lesquelles ils avaient le pouvoir de l'excommunier, il lui dit qu'il n'avait pas besoin de les voir et qu'il en croyait leurs Révérences. Puisqu'elles jugeaient ainsi, avec l'autorité quelles détenaient, il leur obéirait.

Cette affaire achevée, comme il retournait à l'endroit où il se trouvait auparavant, il lui vint le grand désir de visiter à nouveau le mont des Oliviers avant de s'en aller, puisque ce n'était pas la volonté de Notre Seigneur qu'il restât dans ces Lieux Saints. Sur le mont des Oliviers il y a une pierre d'où Notre Seigneur s'éleva vers les cieux et l'on voit aujourd'hui encore les marques de ses pieds. C'est cela qu'il voulait retourner voir. Et alors, sans rien dire à personne ni prendre de guide, (ceux qui vont là-bas sans avoir un Turc comme guide courent un grand péril), il se faufila hors du groupe des pèlerins et s'en fut tout seul au mont des Oliviers. Les gardes ne voulurent pas le laisser entrer. Il leur donna le petit canif de l'écritoire qu'il portait sur lui. Après avoir fait son oraison avec une vive consolation, il fut pris du désir d'aller à Bethphagé. Il s'y rendit. Là, il se souvint qu'il n'avait pas bien regardé sur le mont des Oliviers de quel côté était le pied droit et de quel côté le pied gauche. Il retourna là-haut et je crois qu'il donna ses ciseaux aux gardes pour qu'on le laissât entrer.

Quand on apprit au monastère qu'il était parti de la sorte sans guide, les moines firent diligence pour l'envoyer chercher. En effet, comme il descendait du mont des Oliviers, il tomba sur un chrétien de la ceinture qui servait dans le monastère (26), lequel, brandissant un grand bâton et manifestant une vive colère, faisait mine de vouloir le rosser et, l'ayant rejoint, le saisit avec rudesse par le bras (27). Lui, se laissa facilement emmener. Mais le brave homme ne desserra plus son étreinte.

En allant sur ce chemin, empoigné de la sorte par le chrétien de la ceinture, le Pèlerin reçut de Notre Seigneur une grande consolation : il lui sembla voir le Christ sans cesse au-dessus de lui. Et cela, jusqu'au moment où il arriva au monastère, dura toujours, en grande plénitude.

Chapitre cinquième

Il s'en allèrent le lendemain le lendemain. Arrivés à Chypre, les pèlerins se répartirent sur différents bateaux. Il y en avait, dans le port, trois ou quatre pour Venise.

L'un était à des Turcs, l'autre était un bâtiment très petit et un troisième était un navire très riche et puissant, propriété d'un opulent Vénitien. C'est au patron de ce dernier que certains voyageurs demandèrent de bien vouloir emmener le Pèlerin. Mais, dès que ce patron sut qu'il n'avait pas d'argent, il refusa, bien qu'ils fussent nombreux à le solliciter, faisant l'éloge de leur protégé, etc. L'autre répondit que si cet homme était un saint il n'avait qu'à faire la traversée comme saint Jacques l'avait faite, ou quelque chose de semblable. Ces mêmes intercesseurs obtinrent très facilement pour lui le passage auprès du patron du petit bâtiment.

Ils partirent un jour, avec, le matin, un vent favorable, mais, l'après-midi, survint une tempête qui les sépara les uns des autres. Le grand navire alla se perdre près de ces mêmes îles de Chypre et seuls les passagers furent sains et saufs. Celui des Turcs sombra, et tous les passagers avec lui, au cours de la même tempête. Le petit navire traversa beaucoup d'épreuves et à la fin ils purent accoster au rivage, dans les Pouilles. Tout cela en plein coeur de l'hiver. Il faisait de grands froids et il neigeait. Le Pèlerin n'avait pas d'autre équipement qu'une culotte bouffante d'étoffe grossière qui le couvrait jusqu'aux genoux, laissant ses jambes nues, des chaussures, un justaucorps de toile noire, lacéré en beaucoup d'endroits aux épaules, et un manteau court tout élimé.

Il parvint à Venise à mi-janvier de l'année 1525 ayant passé en mer, depuis son départ de Chypre, tout le mois de novembre, décembre et la portion de janvier écoulée. À Venise il tomba sur un des deux hôtes qui l'avaient accueilli dans leur maison avant qu'il ne partît pour Jérusalem, lequel lui donna en aumône quinze ou seize Jules II (28) et un morceau d'étoffe dont il fit de nombreux plis et qu'il mit sur son estomac à cause du grand froid qu'il faisait.

Depuis que ledit Pèlerin avait compris que c'était la volonté de Dieu qu'il ne restât pas à Jérusalem il rentrait sans cesse en soi-même pour méditer sur ce qu'il devait faire et à la fin il eut inclination à étudier quelque temps pour pouvoir aider les âmes et il résolut d'aller à Barcelone. C'est ainsi qu'il partit de Venise pour Gênes. Comme il se trouvait un jour à Ferrare, dans l'Église principale, en train d'accomplir ses dévotions, un pauvre lui demanda l'aumône et lui donna un petit marc qui est une pièce de cinq ou six liards. Après celui-là il en vint un autre à qui il donna une autre pièce de valeur un peu plus grande. Et au troisième, comme il n'avait plus que des Jules II, il donna un Jules II. Les pauvres, voyant qu'il faisait l'aumône, ne cessaient de venir et de la sorte tout ce qu'il portait s'épuisa. À la fin, beaucoup de pauvres vinrent ensemble demander l'aumône. Il leur répondit qu'il leur demandait bien pardon : il n'avait plus rien.

Il partit ainsi de Ferrare pour Gênes. Il rencontra en chemin des soldats espagnols et cette nuit-là il reçut de bons traitements. Ils s'effrayèrent beaucoup de son itinéraire parce qu'il lui fallait passer presque au milieu de l'une et l'autre armée, celle des Français et celle des Impériaux (29). Ils lui demandèrent de quitter la grand-route et de prendre une autre route, sûre, qu'ils lui montrèrent. Lui, ne suivit pas leur conseil mais continuant d'aller son droit chemin il tomba sur un village brûlé et détruit, si bien qu'avant la nuit il ne trouva personne qui lui donnât de quoi manger. Quand le soleil fut couché il parvint à un village retranché et les gardes l'arrêtèrent tout de suite, pensant qu'il était un espion. Ils le mirent dans une petite maison proche de la porte du village et commencèrent de le soumettre à un interrogatoire comme on a l'habitude de faire quand on a du soupçon. Il répondit à toutes leurs questions qu'il ne savait rien. Ils le déshabillèrent et scrutèrent, inspectant jusqu'à ses chaussures et toutes les parties de son corps pour voir s'il ne portait pas quelque lettre. Et ne pouvant rien tirer de lui par aucun moyen ils l'enchaînèrent pour le mener au capitaine : lui, le ferait parler. Comme il leur demandait qu'on l'emmenât couvert de son petit manteau ils ne voulurent pas le lui rendre et le conduisirent de la sorte, avec sa culotte bouffante et le justaucorps dont il a été parlé ci-dessus.

Dans ce trajet, le Pèlerin eut comme une représentation du Christ quand on l'emmenait lui aussi, bien que ce ne fût pas une vision comme les autres. Il fut conduit le long de trois grandes rues et il marchait sans aucune tristesse, avec allégresse plutôt et contentement. Il avait pour habitude, quand il parlait à quelque personne que ce fût, de lui dire « vous » (30) tenant cela pour une dévotion parce que le Christ faisait de la sorte, ainsi que les apôtres, etc. En allant le long de ces rues, il lui passa par l'esprit qu'il serait bon de renoncer à cette habitude dans un moment si difficile et de donner du « Sa Seigneurie » au capitaine, et cela non sans quelques craintes touchant les tortures qu'on pouvait lui infliger, « puisqu'il en est ainsi, se dit-il, je ne le traiterai pas de « Sa Seigneurie », je ne lui ferai pas révérence et je n'ôterai pas mon chaperon ».

Ils arrivent au palais du capitaine et on le laisse dans une salle basse. Au bout d'un moment le capitaine vient lui parler. Mais lui, sans témoigner la moindre courtoisie, répond par peu de mots et en mettant un intervalle notable entre un mot et le suivant. Le capitaine le prit pour un fou et dit à ceux qui l'avaient amené: «Cet homme n'a pas de cervelle. Donnez-lui ses affaires et jetez-le dehors.» Sorti du palais il rencontra tout de suite un Espagnol qui vivait là, qui l'emmena chez lui et lui donna de quoi mettre fin à son jeûne et tout le nécessaire pour cette nuit.

Il partit au matin et chemina jusqu'au soir. Deux soldats le virent, qui étaient sur une tour, et ils descendirent pour s'emparer de lui. Ils l'amenèrent à leur capitaine, qui était français et celui-ci lui demanda, entre autres choses, de quel pays il était. Apprenant qu'il était du Guipuzcoa, il lui dit : « Moi aussi je suis de là-bas, des environs. » Sans doute était-il d'un pays proche de Bayonne. Et tout de suite il dit aux soldats : « Emmenez-le et donnez-lui à souper et réservez-lui bon traitement.»

Dans ce trajet de Ferrare à Gênes il eut à pâtir de beaucoup d'autres menus incidents et à la fin il arriva à Gênes où il fut reconnu par un Biscayen qui se nommait Portundo et avec qui il s'était entretenu à l'époque où il servait à la cour du Roi Catholique. Grâce à lui il put embarquer sur un bateau qui allait à Barcelone et sur lequel il courut grand péril d'être pris par André Doria qui leur donna la chasse, parce qu'il était alors du côté des Français.

Chapitre sixième

Arrivé à Barcelone il fit part de son inclination pour l'étude à Isabelle Roser (31) et à un maître d'école nommé Ardévol qui enseignait la grammaire. À l'un et à l'autre cela parut fort bien. Lui, s'offrit à l'enseigner gratis, elle, à fournir ce qui serait nécessaire pour sa subsistance. Le Pèlerin avait connu à Manrèse un moine, je crois qu'il était de l'Ordre de saint Bernard, un homme très élevé en spiritualité, et il désirait vivre auprès de lui afin de s'instruire, de pouvoir se donner plus commodément à la vie spirituelle et aussi pour être utile aux âmes. Il leur répondit donc qu'il accepterait leur offre s'il ne trouvait pas à Manrèse la commodité qu'il espérait. Mais étant allé là-bas il apprit que le moine était mort. Il revint alors à Barcelone et se mit à étudier avec assez de diligence. Mais une chose l'embarrassait beaucoup : quand il se mettait à apprendre par coeur, comme c'est nécessaire dans les commencements de la grammaire, il lui venait de nouvelles intelligences des choses spirituelles et de nouveaux goûts pour ces choses. Et cela de telle manière qu'il ne pouvait pas apprendre par c¦ur. Il avait beau lutter contre ces idées, il ne pouvait les chasser.

Il réfléchissait de nombreuses fois là-dessus et il se disait en lui-même : « Ni quand je me mets en oraison ni quand je suis à la messe, ne me viennent ces intelligences si vives. » Et ainsi, peu à peu, il en vint à connaître que c'était de la tentation. Après avoir fait une prière, il s'en fut à Sainte-Marie de la Mer, près de la maison du maître d'école, après avoir demandé à ce maître de bien vouloir venir dans cette église l'écouter un peu. Ils s'assirent. Il lui expliqua tout ce qui se passait dans son âme, fidèlement, et il lui avoua combien peu de progrès il avait fait jusqu'alors à cause de la raison qu'il disait. Mais il fit une promesse audit maître : « Je vous promets de ne jamais manquer d'aller vous écouter pendant ces deux ans, tant que je trouverai à Barcelone du pain et de l'eau avec quoi je puisse subsister. »

Et comme il fit cette promesse avec assez de force, jamais plus il n'eut ces tentations.

La douleur d'estomac qui l'avait pris à Manrèse et à cause de laquelle il avait mis des chaussures, le quitta. Son estomac allait bien depuis son départ pour Jérusalem. C'est pourquoi, tandis qu'il étudiait à Barcelone, le désir lui vint de retourner à ses pénitences passées. Et ainsi il commença par faire un trou dans les semelles de ses chaussures. Il élargit peu à peu ce trou de telle sorte qu'au moment où le froid de l'hiver arriva, il ne portait plus, en guise de souliers, que les empeignes.

Une fois achevés deux ans d'études pendant lesquels, d'après ce qu'on lui disait, il avait fait assez de progrès, son maître lui annonça qu'il pouvait désormais suivre les cours des Arts et qu'il ferait bien d'aller à Alcalà. Cependant il se fit examiner par un docteur en théologie ‹ lequel lui conseilla la même chose. Et ainsi il partit tout seul pour Alcalà bien qu'il eût déjà groupé quelques compagnons, à ce que je crois. À son arrivée, il se mit à mendier et à vivre d'aumônes. Il y avait dix ou douze jours qu'il vivait de cette manière-là quand une fois u prêtre et d'autres personnes qui accompagnaient ce prêtre, le voyant demander l'aumône, se mirent à rire de lui et à lui lancer quelques injures, comme on a coutume de faire envers les gens qui, étant en bonne santé, mendient. À ce moment passait dans la rue un homme qui avait la charge du nouvel hôpital Antezana. Ayant laissé voir que cette scène le peinait, il appela le Pèlerin et l'emmena dans sont hôpital où il lui donna une chambre et tout le nécessaire.

Il étudia de la sorte à Alcalà à peu près un an et demi. C'était en carême de 1524 qu'il était arrivé à Barcelone pour deux ans d'études. Il était donc arrivé à Alcalà en 1526. Il y étudia les Termes logiques de Dominique Soto et la Physique d'Albert le Grand et l'œuvre du Maître des Sentences.

Pendant son séjour à Alcalà il s'occupait à donner les Exercices spirituels et à expliquer le catéchisme et par là se produisit du fruit pour la gloire de Dieu. Il y eut de nombreuses personnes des choses spirituelles et au goût pour ces choses. D'autres subirent des tentations diverses. Telle d'entre elles, voulant se donner la discipline, ne pouvait le faire, ‹ comme si on lui retenait la main. Il y eut encore des choses semblables qui suscitaient des rumeurs dans la population, surtout à cause de la grande affluence qui se manifestait partout où le Pèlerin expliquait le catéchisme.

Dès son arrivée à Alcalà, il fit connaissance avec don Diego de Eguia, lequel vivait dans la maison de son frère. Ce dernier faisait de l'imprimerie, à Alcalà, et possédait largement le nécessaire. Ils l'aidaient, l'un et l'autre, par leurs aumônes, à entretenir les pauvres et le second hébergeait les trois compagnons du Pèlerin dans sa maison.

Une fois, comme le Pèlerin était venu demander l'aumône pour faire face à de certaines nécessités, don Diego lui dit qu'il n'avaient pas d'argent mais il lui ouvrit un coffre où se trouvaient divers objets et il lui donna des parements de lit de couleurs variées, des candélabres et autres choses semblables que le Pèlerin enveloppa toutes dans un drap et qu'il mit sur ses épaules. Puis il s'en fut porter secours aux pauvres.

Comme il a été dit ci-dessus, il y avait grande rumeur dans tout ce pays-là au sujet des choses qui se passaient à Alcalà et les gens en parlaient d'une certaine manière, les autres d'une autreŠ Le bruit parvint jusqu'à Tolède, jusqu'aux Inquisiteurs. Quand ceux-ci arrivèrent à Alcalà, le Pèlerin en fut avisé par leur hôte qui lui dit que tous ces gens les appelaient « les habillés de bure », et je crois même « illuminés », et qu'on allait faire de lui et de ses compagnons, une boucherie. En effet, les Inquisiteurs se livrèrent tout de suite à des recherches et à des enquêtes sur leur vie mais à la fin ils retournèrent à Tolède sans les convoquer, n'étant venus que dans le dessein de s'informer. Ils laissèrent le soin du procès au Vicaire Figueroa, qui appartient à présent aux grands Conseils de l'Empereur. Le Vicaire, au bout de quelques jours, les convoqua et leur apprit comment une recherche et une enquête avaient été faites sur leur vie par les Inquisiteurs. On n'avait trouvé aucune erreur dans leur doctrine ni dans leur genre de vie et, par conséquent, ils pourraient continuer ce qu'ils faisaient, sans aucun empêchement. Mais, comme ils n'étaient pas des religieux, il ne paraissait pas opportun qu'ils aillent tous vêtus d'habits semblables. Il serait bon, et on leur ordonnait, que deux d'entre eux, il montrait du doigt le Pèlerin et Arteaga ‹ fissent teindre leurs vêtement en noir. Deux autres, Calixto et Caceres, les feraient teindre en fauve. Quant à Juanico qui était un jeune garçon français, il pouvait rester comme il était.

Le Pèlerin répondit qu'ils feraient ce qu'on leur commandait : « Mais je ne sais pas, dit-il, de quel profit sont ces inquisitions. Un prêtre n'a pas voulu donner l'autre jour le Saint Sacrement à l'un d'entre nous, sous prétexte qu'il communiait chaque semaine et à moi on fait difficulté à ce sujet. Nous voudrions savoir si l'on n'a pas découvert en nous une hérésie quelconque ? Non, dit Figueroa, s'ils vous en trouvent une ils vous brûleront aussi, répliqua le Pèlerin, s'ils en trouvent une en vous-même. »

Ils firent teindre leurs habits, comme on le leur avait ordonné, et au bout de quinze ou vingt jours, Figueroa enjoignit au Pèlerin de ne pas aller nu-pieds mais de mettre des chaussures. Et il obéit tranquillement, comme en toutes les choses de cette sorte, quand on les lui ordonnait.

Au bout de quatre mois, le même Figueroa fit de nouveau une enquête sur eux*[*À ce que m'a raconté Bustamente]. Outre les griefs habituels, je crois qu'il y avait aussi ce motif : une femme mariée, de qualité, éprouvait une dévotion spéciale envers le Pèlerin. Afin de ne pas être reconnue elle venait le voir la tête couverte, comme c'est la coutume à Alcalà de Henares, dès le petit jour, au matin, à l'hôpital.

En entrant elle se découvrait et gagnait la chambre du Pèlerin. Mais cette fois-là non plus on ne leur fit pas d'ennuis, on ne les convoqua même pas après clôture du procès, on ne leur dit rien du tout.

Quatre mois plus tard, ‹ il habitait déjà dans une petite maison, hors de l'hôpital, un alguazil vint un jour frapper à sa porte, l'appela et lui dit : « Venez un peu avec moi ! » Et, le jetant dans la prison, il lui lança:  «Vous ne sortirez pas d'ici avant qu'on ne vous ait donné de nouveaux ordres!» C'était en été, il n'était pas sous surveillance étroite et beaucoup de gens venaient lui rendre visite*[ Miona notamment, qui était son confesseur.]. Il faisait la même chose qu'en liberté : il enseignait le catéchisme et donnait les Exercices. Il se souvint spécialement de doña Teresa de Càrdenas qui envoya du monde lui rendre visite et lui fit proposer à de nombreuses reprises de le tirer de là. Mais il n'accepta rien, disant toujours: «Celui pour l'amour de qui je suis entré ici m'en tirera si c'est utile à son service.»

Il resta dix-sept jours enfermé sans qu'on l'interrogeât ni qu'il sût la cause de cet internement, après quoi le Vicaire vint à la prison et le questionna sur de nombreux sujets, allant jusqu'à lui demander s'il faisait observer le sabbat par ses disciples. Il lui demanda également s'il connaissait deux certaines femmes, la mère et la fille, ‹ il répondit que oui ‹ et s'il avait été informé de leur départ avant qu'elles se missent en route. Il répondit que non, à cause du serment qu'il avait reçu. Le Vicaire, alors, lui mettant la main sur l'épaule, lui dit, avec des signes  de joie : « Voilà la cause pour laquelle je suis venu ici. » Parmi les nombreuses personnes qui suivaient le Pèlerin il y avait en effet une mère et sa fille, toutes deux veuves, ‹ la fille était très jeune et elle attirait beaucoup les regards, ‹ qui s'étaient avancées très loin dans les choses de l'esprit, surtout la fille, à de telles enseignes que, toutes nobles qu'elles fussent, elles s'étaient rendues à la Véronique de Jean à pied, je ne sais même pas si ce n'était pas en mendiant leur vie, ‹ et seules (32). Cela fit grand bruit dans Alcalà. Le Docteur Ciruelo qui exerçait sur elles une certaine tutelle, crut que le prisonnier les avait engagées lui-même à cette démarche et c'est pourquoi il l'avait fait arrêter. Ayant entendu le Vicaire, le prisonnier lui dit : « Voulez-vous que je vous parle un peu plus longuement de cette affaire ? » Il répondit : « Oui » « Eh bien, sachez, fit-il, que ces deux femmes m'ont importuné bien des fois : elles voulaient courir le monde pour servir les pauvres en allant d'hôpital en hôpital, et moi je les ai toujours détournées des ce projet parce que la fille est bien jeune et attire tellement les regards, etc. Je leur ai dit qu'elles pouvaient fort bien, quand elles voudraient visiter les pauvres, le faire à Alcalà et aller tenir compagnie au Très Saint-Sacrement. »

Cet entretien terminé, Figueroa s'en fut avec son greffier, en emportant toute la relation par écrit.

À cette époque, Calixto était à Ségovie. Ayant appris que le Pèlerin était incarcéré, il arriva tout de suite, bien qu'il relevât depuis peu d'une grande maladie, et il s'installa avec lui dans la prison. Mais le Pèlerin lui dit qu'il ferait mieux d'aller se présenter au Vicaire, lequel lui réserva bon accueil et lui annonça qu'il allait l'envoyer en prison : il fallait qu'il y restât jusqu'au retour des femmes, afin qu'on pût voir si elles confirmeraient ou non ses déclarations. Calixto resta incarcéré quelques jours : comme le Pèlerin voyait que sa santé physique en souffrait, car il n'était pas tout à fait guéri, il le fit libérer par l'intermédiaire d'un Docteur, un grand ami à lui.

Depuis le moment où le Pèlerin entra dans la prison jusqu'au moment où on l'en tira, il s'écoula quarante-deux jours, au bout desquels les deux dévotes étant rentrées, le greffier vint à la prison lire la sentence : le captif était libre mais lui et ses amis devaient s'habiller comme les autres étudiants et ne pas parler de choses de la foi avant d'avoir étudié davantage et pendant quatre ans encore, étant donné qu'ils n'avaient pas d'instruction. En vérité, le Pèlerin était celui qui en savait le plus mais sans bases sérieuses, c'était d'ailleurs la première chose qu'il avait l'habitude de dire quand on l'interrogeait. Cette sentence le rendit un peu hésitant sur ce qu'il allait faire. On fermait la porte à son intention d'aider les âmes, sans lui donner aucune raison, sauf qu'il n'avait pas assez étudié. À la fin il résolut d'aller trouver l'Archevêque de Tolède, Fonseca, et de mettre l'affaire entre ses mains.

Il partit d'Alcalà et rejoignit l'Archevêque à Valladolid. Il lui raconta fidèlement l'épreuve qu'il traversait et il ajouta ceci : bien qu'il ne fût plus sous sa juridiction ni obligé de respecter la sentence, il agirait dans cette affaire selon les ordres qu'il recevrait de lui. En parlant il employa le « vous » comme il avait coutume de faire avec tout le monde. L'Archevêque l'accueillit fort bien et, apprenant qu'il désirait passer à Salamanque, il lui annonça qu'il possédait, dans cette ville aussi, des amis et un collège. Il lui offrit tout cela. Et quand le Pèlerin s'en alla, il lui fit remettre quatre écus.

* * * * *

   24. Il s'agit de quattrini, pièces italiennes de menue monnaie.

   25. Par une grande chance nous possédons deux relations du voyage accompli par ce bateau la Negrona, au printemps de 1523. Il s'agit d'un journal de route tenu par Pierre Füssli, un Zurichois fondeur de cloche, et d'un autre tenu par le Strasbourgeois Philippe hagen. Nous pouvons donc connaître beaucoup de détails concrets ‹ certains très pittoresques ‹ sur cette équipée. Le Grand Turc Soliman avait pris Rhodes en 1522.

   26. On appelait ainsi des chrétiens, originaires de Syrie pour la plupart, attachés au service des moines, notamment pour le maintien de l'ordre. Ils portaient une large ceinture au-dessus de leurs vêtements. Le couvent dont il est question s'appelait couvent du Mont-Sion. Il était occupé par des moines Franciscains à qui incombaient la garde des Lieux Saints et la protection générale des pèlerins pendant leur séjour et au cours de leurs visites.

   27. On s'explique la sévérité du garde quand on lit les relations de ce voyage. Les Turcs ne cessaient alors de faire subir aux pèlerins des vexations de toutes sortes ‹ leur extorquant des sommes d'argent pour la moindre visite et réclamant de fortes rançons s'ils capturaient l'un d'eux. La semaine qui précéda le départ du groupe, cinq cents janissaires vinrent de Damas à Jérusalem et menacèrent de prendre d'assaut le couvent du Mont-Sion. Les pèlerins ne durent leur salut qu'à l'intervention du gouverneur turc qui fit partir les janissaires hors de la ville.

   28. Monnaie pontificale qui valait un dixième de ducat.

   29. Un an plus tard, presque jour pour jour, cette région devait être ensanglantée par la bataille de Pavie.

   30. Cela équivalait en somme à notre tutoiement.

   31. Cette pieuse femme, très dévouée à saint Ignace elle l'aida de ses deniers longtemps lui donna par la suite beaucoup d'ennuis. Elle vint à Rome en 1543, quand la Compagnie avait pris corps, voulut se consacrer à diverses oeuvres fondées par saint Ignace et même, en 1545, elle demanda d'être agrégée au nouvel Institut et de prononcer des voeux solennels. Non seulement elle ne fut pas exaucée mais encore, s'étant rendue insupportable par son caractère et ses exigences, elle finit par recevoir l'invitation formelle de quitter Rome. Elle regagna Barcelone, devint franciscaine au couvent de Sainte Marie de Jésus et mourut paisiblement, tout à fait réconciliée avec saint Ignace. Mais lui, instruit par l'expérience, demanda au Pape que jamais la Compagnie ne fût autorisée à créer une branche féminine.

   32. Jaen est une ville d'Andalousie sise à sise près de 400 km d'Alcala. On y conservait un voile qui aurait été celui avec lequel Véronique essuya le visage du Sauveur. Les deux femmes allèrent plus loin encore, jusqu'en un lieu de pèlerinage, très célèbre en Espagne : Notre-Dame de Guadalupe, en Estrémadure.

   

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