Saint Hugues naquit à
Châteauneuf-d'Isère, près de Valence, en Dauphiné. Pendant que sa
mère le portait dans son
sein,
elle eut un songe où il lui semblait mettre au monde un bel enfant
que saint Pierre, accompagné d'autres saints, emportait dans le Ciel
et présentait devant le trône de Dieu. Cette vision fut pour ses
parents un présage de hautes et saintes destinées; aussi
soignèrent-ils son éducation et n'hésitèrent-ils pas à favoriser sa
vocation ecclésiastique.
Choisi, jeune encore,
par l'évêque de Valence, pour être chanoine de sa cathédrale, il se
vit, à vingt-sept ans, obligé d'accepter le siège épiscopal de
Grenoble, devenu vacant. Il voulut recevoir l'onction épiscopale des
mains du Pape Grégoire VII, qui, connaissant à l'avance son mérite
et ses vertus, lui dévoila toute son âme et lui inspira un zèle
ardent pour la liberté de l'Église et pour la sanctification du
clergé.
Hugues trouva son
évêché dans le plus lamentable état; tous les abus de l'époque y
régnaient en maîtres. Le nouveau Pontife fit d'incroyables efforts
pour raviver la foi et relever les moeurs; ses efforts étant
infructueux, il résolut de quitter sa charge et se réfugia au
monastère de la Chaise-Dieu; mais bientôt le Pape, instruit de ce
qui se passait, lui ordonna de retourner à son évêché et de préférer
le salut des âmes à son repos personnel.
C'est dans les années
suivantes que saint Bruno vint fonder dans son diocèse l'admirable
institution de la Chartreuse. Hugues allait souvent dans cet
ermitage et vivait avec les Chartreux comme le dernier d'entre eux;
son attrait pour la solitude était si fort, qu'il ne pouvait se
décider à quitter cette austère retraite, et Bruno se voyait obligé
de lui dire: \"Allez à votre troupeau; il a besoin de vous;
donnez-lui ce que vous lui devez.\"
Cependant Hugues, par
la puissance de sa sainteté, opérait un grand bien dans les âmes;
ses prédications véhémentes remuaient les foules et touchaient les
coeurs; au confessionnal, il pleurait souvent avec ses pénitents et
les excitait à une plus grande contrition. Après quelques années
d'épiscopat, son diocèse avait changé de face.
Parmi ses hautes
vertus, on remarqua particulièrement sa modestie et sa charité. Dur
pour lui-même, il se montrait prodigue pour les pauvres et alla
jusqu'à vendre pour eux son anneau et son calice. Toujours il se
montra d'une énergie indomptable pour la défense des intérêts de
l'Église; il restera toujours comme l'un des beaux modèles de noble
indépendance et de fier courage. Son exemple apprend aussi que si le
salut des âmes est une chose inestimable, il ne s'opère souvent
qu'au prix d'une longue persévérance et d'une grande abnégation.
Abbé L. Jaud
Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame,
1950. |