Les Morts sont
extrêmement sensibles
Au
lendemain de la très belle fête de Tous les Saints, l’Eglise a pris l’habitude
depuis l’abbé Odilon de Cluny (Xe siècle), de commémorer tous ceux
qui nous ont récemment
“quittés” pour rejoindre la Vie éternelle : les morts de
nos familles, camarades, soldats, amis…
Bien avant saint Odilon déjà, les Chrétiens avaient coutume de penser à leurs
défunts, qui continuent de faire partie de la famille au-delà de la mort.
Jésus-Christ a eu une fois (cf. Lc 20:27-38) l’occasion d’affronter des
Sadducéens au sujet de l’au-delà : ces derniers étaient réputés pour ne pas
croire à la vie éternelle, et Jésus leur fit remarquer que Dieu s’était fait
reconnaître comme le “Dieu d’Abraham, d’Isaac, de Jacob”, et donc que Dieu n’est
pas un Dieu de morts, mais de vivants. C’était indirectement confirmer que la
vie ne s’arrête pas à la fin de la vie biologique.
Une tradition constante dans l’Eglise a été celle de prier pour les morts,
d’offrir à Dieu des prières et des sacrifices pour aider ces morts à être
entièrement purifiés avant d’entrer définitivement dans la Gloire du Ciel. Le
Catéchisme rappelle que Judas Maccabée fit une collecte et “fit faire ce
sacrifice expiatoire pour les morts, afin qu’ils fussent délivrés de leur péché”
(2 M 12,46). De là vient notre croyance en ce “lieu” de purification, qu’on a
appelé le Purgatoire. Qu’il s’agisse d’un endroit particulier, ou d’un état
transitoire des âmes des défunts, c’est difficile de le dire ; c’est une
tradition de l’Eglise de parler d’un feu purificateur (voir Catéchisme, n.1031).
Certaines “visions” plus tardives de grands Saints y ont clairement fait
allusion, entre autres celles de sainte Catherine de Gênes tout particulièrement
(XVIe siècle).
Du reste, on n’imagine pas que la moindre imperfection puisse s’infiltrer dans
le Ciel ; et aussi il est certain que personne ne meurt dans un état d’âme
parfaitement pur, comme le sont les Anges au Paradis ; telle fut donc de tous
temps la pensée de l’Eglise, à l’origine des prières qu’on fait pour tous les
défunts.
Saint Augustin précise aussi, et loue cette pieuse coutume, que les chrétiens
priaient pour tous les morts, afin que ceux qui n’avaient laissé sur terre ni
parents, ni enfants, ni amis ne fussent pas cependant délaissés. Où nous voyons
que l’Eglise a toujours été cette bonne Mère pour tous ses fidèles.
Une autre coutume, d’origine espagnole, fit que, pour satisfaire aux nombreuses
demandes de prières et de messes pour les défunts, les moines avaient pris
l’habitude de célébrer plusieurs messes en ce jour. Coutume d’abord tolérée,
puis véritablement autorisée en Espagne et au Portugal. Au lendemain de la
première Guerre mondiale, le pape Benoît XV étendit cette pratique à l’Eglise
universelle, en pensant aux morts de la guerre, aux nombreux prêtres qui étaient
morts sans pouvoir célébrer les Messes qu’on leur avait demandées, mais aussi
aux innombrables victimes de cette guerre affreuse. C’est depuis que les prêtres
se sont accoutumés à célébrer en ce 2 novembre trois Messes, une aux intentions
du Pape, une pour tous les Morts, une pour tel Défunt particulier.
Cette belle coutume s’est un peu affaiblie récemment, car diverses tendances
théologiques se sont fait jour, restreignant d’une part la dévotion pour les
“âmes du Purgatoire”, et développant d’autre part la pratique de la
concélébration eucharistique. On a fait remarquer, avec une certaine justesse,
que les prières et les Messes n’entraient pas dans une sorte de “compte
mathématique” où le Bon Dieu établissait des additions et des soustractions pour
déterminer à quelle date serait “délivrée” telle âme. Ceux qui ont connu le
triste monde carcéral savent de quoi il s’agit, et Dieu notre Père est
certainement en-dehors de cette vision terrestre des délits et des peines dues.
Il reste que les Apôtres ont bien reçu de Christ cette invitation solennelle à
répéter Son Sacrifice et donc à multiplier les prières, en particulier pour les
Morts, sinon Il n’aurait pas expressément dit : “Faites ceci en mémoire de moi”.
Comme l’Eglise nous propose aujourd’hui un choix immense de lectures, de
psaumes, d’évangiles, on ne va pas ici les commenter ; si tel ou tel Internaute
désire un commentaire plus approprié, qu’il en fasse la demande et on aura grand
plaisir à lui répondre sur ce site.
Reste que nous unissons tous aujourd’hui nos prières pour tous les morts. Prions
particulièrement pour ceux qui s’endorment loin de tous, dans la solitude, dans
l’oubli général. Quand tel ami, telle personne connue quitte cette vie
terrestre, les fidèles et les proches réunissent souvent beaucoup de dons pour
“faire célébrer des Messes”, sans parler des abondantes couronnes de fleurs.
Quand un pauvre homme s’éteint dans sa petite maisonnette, personne n’est là,
tandis que c’est peut-être d’abord cet homme-là qui a besoin de nos prières. Il
y a des chrétiens et des prêtres qui ont chaque jour cette pensée très
fraternelle de prier pour tous ceux qui sont en ce moment en agonie, pour tous
ceux qui mourront aujourd’hui.
Les Morts sont extrêmement sensibles à cette charité des Vivants envers
eux-mêmes. Ayons tous cette fraternelle sollicitude, bien conscients que tous,
Vivants et Morts, nous sommes une grande Famille dans laquelle toutes les
prières forment un faisceau lumineux qui monte vers Dieu et retombe en grâces
pour tous.
Que par la miséricorde de Dieu les âmes des Fidèles Défunts reposent en paix !
|