Mourir en Christ
Chers frères
et sœurs,
Bonjour et tous
mes compliments car vous êtes courageux avec ce froid sur la
place. Tous mes compliments.
Je désire mener
à terme les catéchèses sur le « Credo », qui se sont
déroulées au cours de l’Année
de la foi, qui s’est conclue dimanche dernier.
Dans cette catéchèse et dans la prochaine je voudrais
considérer le thème de la résurrection de la chair, en
saisissant deux de ses aspects tels que les présente
le Catéchisme
de l’Eglise catholique, c’est-à-dire notre mort et
notre résurrection en Jésus Christ. Aujourd’hui, je
m’arrête sur le premier aspect, « mourir en Christ ».
Il existe
communément parmi nous une manière erronée de considérer
la mort. La mort nous concerne tous, et elle nous
interpelle de manière profonde, en particulier quand elle
nous touche de près, où quand elle frappe les petits, ceux
qui sont sans défense d’une manière qui nous semble «
scandaleuse ». J’ai personnellement toujours été frappé par
cette question : pourquoi les enfants souffrent-ils ?
Pourquoi les enfants meurent-ils ? Si elle est comprise
comme la fin de tout, la mort effraie, anéantit, se
transforme en une menace qui détruit chaque rêve, chaque
perspective, qui brise chaque relation et interrompt chaque
chemin. Cela se produit quand nous considérons notre vie
comme un temps compris entre deux pôles : la naissance et la
mort ; quand nous ne croyons pas à un horizon qui va au-delà
de la vie présente ; quand on vit comme si Dieu n’existait
pas. Cette conception de la mort est typique de la pensée
athée, qui interprète l’existence comme le fait de se
trouver par hasard dans le monde et de s’acheminer vers le
néant. Mais il existe aussi un athéisme pratique, qui est
une manière de vivre uniquement pour ses propres intérêts et
de vivre seulement pour les choses terrestres. Si nous nous
laissons prendre par cette vision erronée de la mort, nous
n’avons pas d’autre choix que celui d’occulter la mort, de
la nier, ou de la banaliser, pour qu’elle ne nous fasse pas
peur.
Mais le « cœur
» de l’homme, le désir d’infini que nous avons tous, la
nostalgie de l’éternel que nous avons tous se rebellent
devant cette fausse solution. Et alors, quel est le sens
chrétien de la mort ? Si nous regardons les moments les
plus douloureux de notre vie, quand nous avons perdu une
personne chère — nos parents, un frère, une sœur, un
conjoint, un enfant, un ami —, nous nous apercevons que,
même dans le drame de la perte, même déchirés par le
détachement, de notre cœur s’élève la conviction que tout ne
peut pas être fini, que le bien donné et reçu n’a pas été
inutile. Un instinct puissant existe en nous, qui nous dit
que notre vie ne finit pas avec la mort.
Cette soif de
vie a trouvé sa réponse réelle et fiable dans la
résurrection de Jésus Christ. La résurrection de Jésus ne
donne pas seulement la certitude de la vie au-delà de la
mort, mais elle illumine également le mystère même de la
mort de chacun de nous. En effet, l’Église prie : « Si nous
sommes attristés par la certitude de devoir mourir, nous
sommes réconfortés par la promesse de l’immortalité future
». Voilà une belle prière de l’Église ! Une personne tend à
mourir comme elle a vécu. Si ma vie a été un chemin avec le
Seigneur, un chemin de confiance dans son immense
miséricorde, je serai préparé à accepter le moment ultime de
mon existence terrestre comme l’abandon définitif plein de
confiance entre ses mains accueillantes, dans l’attente de
contempler face à face son visage. C’est la plus belle chose
qui puisse nous arriver : contempler face à face ce visage
merveilleux du Seigneur, le voir comme Il est, beau, plein
de lumière, plein d’amour, plein de tendresse. Nous allons
jusqu’à ce point : voir le Seigneur.
Dans cet
horizon, on comprend l’invitation de Jésus à être toujours
prêts, vigilants, en sachant que la vie dans ce monde nous
est donnée également pour préparer l’autre vie, celle avec
le Père céleste. Et il existe pour cela une voie sûre : bien
se préparer à la mort, en étant proches de Jésus. Telle
est la sécurité : je me prépare à la mort en étant près de
Jésus. Et comment fait-on pour être près de Jésus ? Avec la
prière, dans les sacrements et aussi dans la pratique de la
charité. Rappelons-nous qu’il est présent chez les plus
faibles et nécessiteux. Il s’est lui-même identifié à eux,
dans la célèbre parabole du jugement dernier, quand il dit :
« Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu
soif et vous m’avez donné à boire, j’étais un étranger et
vous m’avez accueilli, nu et vous m’avez vêtu, malade et
vous m’avez visité, prisonnier et vous êtes venus me voir.
[...] Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus
petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25,
35-36.40). C’est pourquoi une voie sûre est de retrouver le
sens de la charité chrétienne et du partage fraternel, de
prendre soin des plaies corporelles et spirituelles de notre
prochain. La solidarité en compatissant à la douleur et en
donnant l’espérance constitue les prémisses et la condition
pour recevoir en héritage ce Royaume préparé pour nous. Qui
pratique la miséricorde ne craint pas la mort. Pensez bien à
cela : qui pratique la miséricorde ne craint pas la mort !
Vous êtes d’accord ? Nous le disons ensemble pour ne pas
l’oublier ? Qui pratique la miséricorde ne craint pas la
mort. Et pourquoi ne craint-il pas la mort ? Parce qu’il la
regarde en face dans les blessures de ses frères, et il la
dépasse avec l’amour de Jésus Christ.
Si nous ouvrons
la porte de notre vie et de notre cœur à nos frères les plus
petits, alors notre mort aussi deviendra une porte qui nous
introduira au ciel, dans la patrie bienheureuse, vers
laquelle nous nous dirigeons, en souhaitant ardemment
demeurer pour toujours avec notre Père, Dieu, avec Jésus,
avec la Vierge et avec les saints.
Audience
générale du mercredi 27 novembre 2013 |