Colomban de Luxeuil
Abbé cistercien, fondateur de Luxeuil, Saint
ca. 543-615

Saint Colomban, (Columbatlus), abbé, né vers l'an 543 dans la province de Leinster en Irlande, se rendit à l'école de Cluin-lnys et il y apprit sous saint Silène la grammaire, la rhétorique, la géométrie, la poésie et les autres sciences qu'on enseignait alors dans cette abbaye. Il alla ensuite prendre l'habit à Bangor, célèbre abbaye dans le comté de Down où il se perfectionna dans les arts libéraux, et, très-jeune encore, il avait déjà composé un commentaire sur les psaumes.

Son ardeur pour l'étude ne l'empêchât pas de se distinguer par sa piété et de se livrer aux pratiques les plus austères de là mortification. Son attrait pour une vie plus solitaire lui inspira le désir de quitter l'Irlande et de passer dans une contrée étrangère. Il demanda à saint Comgall, son abbé, la permission de quitter Bangor ; ce qui ne lui fut accordé qu'avec peine, parce qu'on tenait à conserver un religieux d'un si rare mérite.

Après avoir reçu la bénédiction du saint abbé, il partit avec douze moines, parmi lesquels étaient saint Gai et saint Déicole, et après avoir traversé l'Angleterre, il aborda dans les Gaules vers l'an 585 : partout où il passait, il annonçait la parole de Dieu avec d'autant plus de succès que la sainteté de sa vie donnait de la force à ses prédications. Ce qui excitait surtout son zèle, c'était de voir le relâchement dans lequel était tombée la discipliné ecclésiastique, à cause des incursions des barbares, et aussi par la négligence des évêques. Ses vertus et celles de ses compagnons inspiraient la piété partout sur leur passage. Gontran, roi d'Orléans et de Bourgogne, invita Colomban à se fixer dans son royaume et lui permit de bâtir un monastère, là où il voudrait. Colomban choisit le château d'Auegrai, qui tombait en ruines et qui était situe dans la partie montagneuse du pays qui prit plus lard le nom de Lorraine. Ce monastère, qui n'existe plus depuis longtemps, se trouva bientôt trop petit pour contenir tous ceux qui demandaient à vivre sous sa conduite. Il en bâtit un second, vers l'an 600, celui de Luxeuil, qui devint le chef-lieu de Son ordre. Il en bâtit ensuite un troisième à (rois lieues de Luxeuil, lequel porta le nom de Fontaines, parce qu'il était situa dans un lieu où il y avait beaucoup de sources. Ces maisons avaient chacune un supérieur particulier et le saint fondateur résidait dans chacune successivement, adressant des instructions aux moines sur les devoirs de leur état. Il leur donna une règle qu'il tenait, dit-il, de ses pères, c'est-à-dire, qu'il avait vu pratiquer en Irlande, et qui est devenue célèbre ; elle est suivie de deux pénitentiels, l'un qui prescrit les pénitences qu'on doit imposer aux moines, lorsqu'ils tombent dans quelques fautes, et l'autre qui est un recueil de pénitences canoniques pour toutes sortes de personnes et pour toutes sortes de péchés. Dans les premiers temps de l'institut, saint Colomban et ses disciples ne vivaient que d'herbes et d'écorces d'arbres. Leur pauvreté était telle que Dieu daigna, plusieurs fois, venir au secours de ses serviteurs d'une manière miraculeuse.

Saint Colomban, d'après l'usage d'Irlande, célébrait la fête de Pâques le quatorzième jour de la lune, quand même ce jour tombait un dimanche. Les évêques de France l'en ayant repris, il consulta saint Grégoire le Grand. Le pape ne lui ayant pas répondu, il écrivit une seconde lettre qui resta aussi sans réponse, et il est probable que saint Grégoire ne les reçut pas. Il écrivit ensuite aux évêques des Gaules assembles en concile, pour les prier que chacun s'en fit à sa propre coutume sur le temps où l'on devait célébrer la Pâque. Il s'adressa aussi, pour le même sujet, à Sabinien et à Boniface III, successeurs de saint Grégoire ; mais leur court pontificat ne leur laissa pas le temps de lui faire parvenir leur décision.

Quelques années après il encourut la haine de Thierry, roi de Bourgogne, ou plutôt celle de Brunehaut, son épouse, qui régnait sous son nom. Colomban reprocha au prince sa conduite scandaleuse et l'exhorta à contracter un mariage digue de lui ; ce que Thierry promit de faire ; car il avait beaucoup de vénération pour le saint abbé. Brunehaut, qui craignait qu'une reine ne lui fit perdre le crédit qu'elle avait sur son petit-fils, trouva le conseil fort mauvais. Son ressentiment fui encore augmenté pur le refus que lis le saint de donner sa bénédiction aux enfants naturels du roi. Ils ne peuvent, dit-il, hériter de la couronne, étant le fruit de la débauche ; mail ce qui acheva delà rendre furieuse c'est que s'étant présentée à la porte du monastère, l'entrée lui en fut refusée par Colomban, qui s'était fait une loi du ne la permettre à aucune femme. L'occasion de se venger se présenta bientôt. Comme Thierry ne tenait pas la promesse qu'il avait faite de renvoyer ses concubines, le saint lui écrivit avec fermeté, lui reprochant son manque de parole et le menaçant de la peine de l'excommunication, s'il ne changeait sa conduite. Brunehaut représenta au roi qu'une lettre semblable était un outrage à la dignité royale el arracha à son petit-fils un ordre qui exilait le saint. On le conduisit d'abord à Besançon, où il fut très bien accueilli par saint Nicet, archevêque de celle ville, qui le logea chez lui. Deux gentilshommes furent ensuite chargés l'escorter jusqu'à Nantes et de ne pas le quitter qu'il ne fût embarqué pour l'Irlande. Des vents contraires ayant forcé le vaisseau à rentrer au port, Colomban se rendit auprès de Clotaire II, qui régnait sur la Neustrie, et lui prédit qu'en moins de trois ans, il serait maître de toute la monarchie française : prédiction qu'il avait déjà faite sur la route. Ensuite il passa par Paris et par Meaux pour se rendre à la cour de Théodebert, roi d'Austrasie, et frère de Thierry, qui le reçut avec bonté et lui promit sa protection.

L'exil de saint Colomban eut lieu en 610, et, cette même année, il écrivit aux moines de Luxeuil pour les exhorter à la patience, à l'union el à ma charité. Quelques-uns de ses disciples, parmi lesquels on compte saint Gal et saint Babolein, étant venus le joindre à Metz, il partit avec eux pour aller prêcher l'Évangile aux infidèles qui habitaient près do lac de Zurich, et qui étaient aussi cruels qu'adonnés aux superstitions de l'idolâtrie. Un jour qu'ils se préparaient à offrir un sacrifice, il leur demanda ce qu'ils voulaient faire d'une cuve pleine de bière qu'il vit au milieu d'eux. Ils répondirent que c'était une offrande à leur dieu Wodan. Alors animé d'un saint zèle, il souffla sur la cuve qui se brisa avec un grand bruit, et la bière fut répandue. Il profila ensuite de la surprise que ce prodige inspirait aux barbares pour les exhorter à quitter le paganisme. Plusieurs se convertirent et reçurent le baptême ; d'autres, qui avaient déjà été baptisés auparavant, et qui étaient retournés à l'idolâtrie, abjurèrent leur apostasie. Saint Gai enhardi par ces heureuses dispositions mille feu aux temples des idoles et jeta dans le lac les offrandes qui s'y trouvaient, ce qui irrita tellement ceux qui restaient attachés à leurs superstitions qu'ils résolurent de le faire mourir et de chasser saint Colomban après l'avoir battu de verges. Ceux-ci, informés de ce dessein, se retirèrent à Arliun, sur le lac de Constance, où ils furent reçus par un saint prêtre, nommé Villemar, qui leur procura une retraite dans une vallée agréable, près de Bregenz. Ils y trouvèrent un oratoire dédié à sainte Aurélie, autour duquel ils se construisirent des cellules. Les habitants du lieu qui avaient eu autrefois quelque connaissance du christianisme, étaient retombés dans l'idolâtrie, et ils avaient même placé dans l'oratoire trois statues de cuivre doré qu'ils adoraient comme dieux tutélaires du pays. Saint Gai, qui connaissait leur langue, en convertit un grand nombre par ses prédications ; il réduisit les idoles en pièces et les jeta dans le lac. Ensuite Colomban aspergea l'église d’eau bénite, tourna autour avec ses disciples en chantant des psaumes et en fit ainsi la dédicace. Il fit des onctions à l'autel, mit des reliques de sainte Aurélie et célébra les saints mystères. Toutes les personnes, qui assistèrent à ces cérémonies avaient été très touchées, et s'en retournèrent avec la résolution de ne plus adorer que le vrai Dieu. C'est là l'origine du monastère Bregenz, le plus ancien de l'Allemagne.

Par crainte de Thierry qui, suite à la mort de son frère, devenait ainsi maître du pays, Colomban préféra s’en aller en Italie, où il partit accompagné par plusieurs de ses disciples, en l’année 613.

Il fut bien accueilli par Aigulfe, roi des Lombards, qui l'aida à fonder le monastère de Bobbio, dans les montagnes de l'Apennin. Saint Colomban fit bâtir, dans le voisinage, un oratoire dédié a la sainte Vierge, près d'une caverne où il se retirait seul pendant le carême et une grande partie de l'année, ne paraissant guère au monastère que les dimanches et les jours de fêtes. L'affaire des trois chapitres après avoir troublé l'Orient, agitait alors l'Occident, et surtout l'Italie. Saint Colomban, qui ne connaissait l'état de la question que par le rapport des Lombards, écrivit, à la prière d'Aigulfe, une lettre à Boniface IV, dans laquelle il prenait la défense des trois chapitres, et s'élevait contre le pape Vigile.

Clotaire II, étant devenu seul maitre de la monarchie par la défaite de Sigebert, fils de Thierry, se rappela la prédiction de saint Colomban et lui fil proposer par saint Eusiate, abbé de Luxeuil, de revenir en France ; mais il répondit qu'il ne pouvait quitter l'Italie et exhorta Clotaire à mener une vie plus chrétienne. Celui-ci, pour lui donner une marque de son estime, prit le monastère de Luxeuil sous sa protection spéciale et en augmenta considérablement les revenus par ses libéralités. Saint Colomban mourut à Bobbio le 21 novembre 615, âgé d'environ soixante-douze ans. Il est regardé comme un des principaux patriarches de la vie monastique, surtout en France, où la plupart des moines suivirent sa règle jusqu'à Charlemagne, qui fil adopter partout celle do saint Benoit, pour garder l'uniformité. Outre sa règle, suint Colomban a laissé seize discours sur les devoirs de l'état monastique ; des poésies sur des sujets de morale el de piété qui prouvent qu'il était bon poêle , pour ¡c siècle où il vivait, et qu'il connaissait l'histoire profane, el même la mythologie ; un ouvrage contre les ariens qui se trouvaient encore parmi les Lombards, et quelques lettres.

 

 

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