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La voix du Père est
là pour nous redonner force
Ce deuxième dimanche
de Carême comporte toujours l’évangile de la Transfiguration. Comme
Jésus avec les Apôtres, l’Église nous fait vivre ce moment solennel
avant la Passion, pour que nous soyons réconfortés par la vision de
sa gloire future. C’est notre 4e “mystère
lumineux”.
Jésus n’a pas pris
avec lui tous les Apôtres ; seulement ces trois qui seront aussi
avec lui au moment de son agonie à Gethsémani, et qui seront les
trois colonnes de la première évangélisation, Jacques à Jérusalem,
Jean à Éphèse, Pierre à Antioche puis Rome. Eux, qui devaient
entendre Jésus prier son Père à Gethsémani, le voir arrêter par les
prêtres et les soldats romains, puis horriblement maltraité avant
d’être crucifié, avaient besoin d’avoir cette vision consolante de
la Transfiguration.
Moïse est là, avec
Élie ; le premier, préfigurant Jésus Christ, a fait sortir le peuple
d’Israël de l’esclavage jusque dans la Terre promise ; l’autre, le
plus célèbre des prophètes d’Israël, enlevé au ciel sur un char de
feu. Leur présence sur le Thabor avec Jésus atteste la vérité de
leur mission. Pierre le sent bien, qui s’offre à construire trois
tentes, pour Jésus, pour Moïse et pour Elie. Ces tentes devaient
être, dans l’esprit de Pierre, des sortes de piédestaux couverts,
pour honorer ces trois Personnages très saints.
La voix qu’ils
entendent, celle du Père, va les surprendre et leur inspirer une
sainte crainte (ils tombent la face contre terre, en adoration),
mais ce n’est pas la première fois qu’ils entendent ces mots : ils
les ont entendus lors du baptême de Jésus par Jean-Baptiste, et nous
l’avons lu il y a peu de temps. De même que le Père les a avertis
d’écouter Jésus au début de sa vie publique, de même ils devront
continuer de l’écouter après sa mort ; la mort sera une épreuve très
douloureuse, oui, mais un passage, avant la Résurrection.
Comme Jésus connaît
bien ses amis ! et comme il nous connaît bien ! Il sait bien qu’à la
moindre déception nous perdons courage ! Il sait bien qu’à son
arrestation à Gethsémani, presque tous les Apôtres vont déguerpir
comme des petits lapins affolés !
La voix du Père est là
pour nous redonner force : Vous souffrez ? Vous êtes découragés ?
Vous voulez partir ? Attendez : regardez Jésus qui s’offre pour
vous, fidèle ; suivez-Le : Écoutez-Le !
Suivre Jésus qui obéit
à son Père, comme le fit Abraham pour quitter son pays et venir en
Canaan, c’est toujours la meilleure voie. Abraham ne savait pas où
il partait, mais il faisait confiance à l’ordre de Dieu. Ainsi ont
fait les Apôtres, après le désarroi qu’ils sentirent au moment de la
Passion de Jésus ; bien vite ils se reprirent : à la Résurrection,
ils se sont retrouvés avec Marie, Thomas a cru, Pierre a demandé
pardon, et tous sont partis évangéliser le monde.
“Dieu veille sur
ceux qui le craignent”, dit le psaume 32, “pour
les délivrer de la mort, les garder en vie aux jours de famine”.
Abraham ne connaissait pas encore ce psaume, mais il l’a vécu par
anticipation. Il est parti… Que dirons-nous de nos frères chrétiens
chaldéens persécutés en terre d’Irak, qui ne peuvent pas même se
réfugier “en Canaan”, en Palestine, au Liban, à cause de la haine
implacable qui se déchaîne dans toutes ces contrées…
Tous ces hommes, et
bien d’autres avec eux, avant et après eux, “prennent
leur part de souffrance pour l’annonce de l’Évangile”. Paul,
après sa conversion, puis ses disciples, Timothée entre autres,
toute la longue lignée des Martyrs de tous les temps, jusqu’à ce
vingtième siècle écoulé, si hostile à Dieu et si meurtrier ― ont
pris part à ces souffrances et les ont acceptées en union avec
celles du Christ, dans l’attente de la Résurrection.
Sanguis Martyrum,
semen Christianorum : le sang des Martyrs, c’est une semence de
Chrétiens.
Abbé Charles Marie de
Roussy
Commentaire pour le II dimanche de Carême, année A |