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Les longues épreuves

5-1-La mort de Barthélémy Hermitte

Jean Peytieu, le fidèle confesseur, était mort d’épuisement en mars 1689. Barthélémy Hermitte restera directeur au Laus et s’attèlera à la restauration des bâtiments détruits. Mais épuisé et gravement malade, il mourut le 24 août 1693. Il n’avait, pense-t-on, que 53 ans. Jean Magnin, le directeur chapelain du Laus, lui succéda comme administrateur des biens du Laus jusqu’à l’automne 1696; mais il fut peu à peu écarté par de nouveaux venus, Michel Rostolland et  Jean-Ange Honoré, nettement jansénisants, qui avaient été nommés en 1693, par le vicaire général, Gabriel Viala, très hostile au Laus. Ils ne prirent la direction effective du Laus qu’en septembre 1696.

Toutes ces épreuves étaient lourdes pour Benoîte qui s’activait de nouveau au service des pèlerins dont le courant avait repris. La Vierge intervenait pour prévenir ses amis de ne pas se décourager mais d’accueillir avec courage les épreuves qui allaient venir. Marie continuait à enseigner Benoîte. Ainsi, écrit Pierre Gaillard, “Benoîte priant plutôt Marie que Jésus, la divine[1]  Mère l’avertit qu’elle devait plutôt recourir à Jésus, son très cher Fils; elle (Benoîte) devait ensuite conjurer Marie de prier Jésus pour elle, d’être son avocate et sa bonne Mère; de ne l’oublier pas ni les pauvres pécheurs...” Car Marie ne vient qu’en second derrière Jésus. Elle vient nous soutenir maternellement dans nos pauvres prières de pauvres pécheurs.

5-2-Les attaques contre le Laus

        5-2-1-Les rumeurs

De 1696 à 1699, on fera courir des rumeurs contre Benoîte et François Aubin. Benoîte sera traitée d’épileptique, tournée en ridicule par les nouveaux directeurs qui feront tout pour l’éloigner des pèlerins. Par ailleurs, François Aubin irritait les jeunes directeurs qui obtiendront qu’il soit éloigné du Laus, où il ne pourra plus venir que le dimanche, pour assister à une seule messe.

Au printemps 1697, l’abbé Laurent Léotaud, curé de Saint-Julien-en-Champsaur, très estimé à Gap et à Embrun, vint au Laus où il résida jusqu’en automne 1998. Très favorable au jansénisme, il mettait en doute les bienfaits du Laus et l’action de Benoîte. L’atmosphère devenait insupportable pour les amis du Laus. Son successeur enverra à l’évêque, Mgr de Genlis un rapport si défavorable, que ce dernier songera à enfermer Benoîe dans un monastère. Magnin n’échappa pas aux malveillances... La Vierge Marie conseilla la prudence et la patience.

        5-2-2-Les manœuvres officielles

Vers 1700, Mgr de Genlis, mal informé, s’irrita contre le Laus. On eut même l’audace, en 1703, d’écrire que “le Laus n’était qu’un abus, ce qui troubla quelques personnes de qualité, mais point le menu peuple.” François Aubin fut même interdit de séjour au Laus pendant au moins six mois. Cependant, après un long séjour à Paris, pour régler ses  affaires familiales, Mgr de Genlis se rendit compte, peu à peu, que le jansénisme était devenu un véritable parti politique hostile au pouvoir royal.

Pourtant l’atmosphère restait lourde au Laus avec ses directeurs proches du jansénisme. Pierre Gaillard rapporte, en effet, un conseil de l’Ange qui visite Benoîte: “Ne dîtes pas que ces prêtres sont jansénistes, car cela a trois mauvais effets: cela détruit la dévotion; cela porte  préjudice; et on fait tort à son âme par une médisance qui va plus loin qu’on ne croit.”

L’Ange annonce même à Benoîte “qu’il y aura bientôt un grand changement au Laus, les prêtres présents allant être nommés à d’autres postes.” En attendant, les calomnies continuent, jusqu’au jour où, le 14 juillet 1707, l’évêque de Gap, Mgr Malissoles, publie un Mandement contre le jansénisme. Mais au Laus, c’est toujours l’attente; les directeurs, changent, mais sans modifier l’attitude des chapelains qui voyagent beaucoup, confessent peu, et souvent même, refusent de confesser. Le travail de sape continue.

Cette sombre période durera jusqu’en 1714 avec l’arrivée des Gardistes.

Pendant tout ce temps, Benoîte continue à souffrir, mais elle reçoit du Ciel de nombreux encouragements pendant ses longues prières. Marie et l’ange la visitent toujours. On l’invite à manger davantage pour mieux prier et mieux servir Dieu. Elle est incitée à prier pour ses persécuteurs et à s’occuper activement afin de lutter contre la tristesse. Pierre Gaillard écrit que Benoîte est très affligée “quand Dieu est offensé mortellement par des voies extraordinaires, surtout par des Ecclésiastiques et d’autres personnes consacrées à Dieu, et de tout sexe où elle voulait mettre bon ordre et n’a pas pu.” L’Ange affirme “que les afflictions et les épreuves sont la voie du Ciel si nous les prenons avec amour et patience.”

Ainsi, malgré toutes les difficultés rencontrées, Benoîte est restée au Laus, dans l’obéissance. Bien que contré, le pèlerinage se poursuit...


[1] terme impropre, employé par P. Gaillard. Marie n’est pas divine, mais seulement la sainte Mère de Dieu.

    

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